Il était une fois dans l'Oued

Mercredi 26 octobre 2005

de Djamel Bensalah (Fr, 1h33) avec Julien Courbey, David Saracino, Marilou Berry...

Lointainement inspiré d'un (excellent) morceau de 113 (Tontons du bled), le troisième long de Djamel Bensalah nous donne raison d'avoir défendu son auteur dans la tourmente d'un Raid il est vrai assez moyen. Car on y retrouve ce qu'on aime chez lui : un regard utopiste mais lucide sur une société où le lien communautaire peut s'envisager comme un grand échange, une sorte de partouze culturelle où un blanc se rêve en arabe et vice versa, un beur peut décider d'être juif, et tout le monde de vivre ensemble une fois les rôles troqués. Cela passe par un argument de comédie : deux zozos de banlieue, l'un complètement fêlé (Julien Courbey, vraiment fascinant avec son corps de jeune plus si jeune et sa tchatche dévastatrice), l'autre presque sage à quelques arnaques près (David Sarafino, pas très bon en revanche, c'est la faiblesse du film), se retrouvent sur le même bateau direction Alger. Le premier est clandestin (il est Français, mais est persuadé d'être né en Algérie !), son pote est trop de là-bas, si bien qu'il doit supporter famille et tradition culturelle qui voudraient le marier avec une fille du bled. Cette fable drôle, jamais vulgaire, toujours juste et même parfois touchante (on a le droit de verser sa petite larme à la fin !), Bensalah a l'intelligence de l'avoir antidatée en 1988, soit avant les "événements". Le contexte politique ne surgit que par petites touches (on hurle des "Mitterrand !" aux arrivants français), mais ce qui irrigue le désir du cinéaste, c'est surtout le plaisir de raconter un pays, de le montrer aussi beau qu'un paysage du Seigneur des Anneaux, de s'y plonger âme et surtout corps (belles scènes dans un club ou dans un lieu de rendez-vous intimes), d'y faire circuler quelques fantômes et beaucoup de bien vivants. Il était une fois dans l'Oued rappelle ainsi le Gérard Oury de la meilleure période, et cette générosité-là, pas exempte de défauts certes, est en tout cas bien au-dessus de l'ordinaire comique français de ces derniers temps.Christophe Chabert