Collision
de Paul Haggis (EU, 1h47) avec Sandra Bullock, Matt Dillon, Don Cheaddle...
Une chose est frappante en cette rentrĂ©e cinĂ©ma : l'omniprĂ©sence de ce qu'il faut bien appeler un œcumĂ©nisme rassurant, oĂą l'idĂ©e mĂŞme de porter un jugement paraĂ®t pĂŞchĂ© mortel pour les cinĂ©astes. Ă€ ce jeu, Collision, premier film de Paul Haggis (qui, en tant que scĂ©nariste, avait grandement participĂ© Ă la rĂ©ussite de Million Dollar Baby), est celui qui pousse cet œcumĂ©nisme jusqu'Ă un intenable paroxysme. Tissant dans les rues de L.A. une dizaine de rĂ©cits qui se croisent et avec comme dĂ©nominateur commun les rapports ethniques entre les personnages, le film tend vers une grande absolution oĂą il n'y a ni salauds, ni saints, juste des gens ordinaires avec leurs moments de crise et leurs instants de bontĂ©. Soit un Short Cuts sans cruautĂ©, un Magnolia qui n'assumerait pas au grand jour son catholicisme ... FilmĂ© avec beaucoup d'effets, comme un pilote de sĂ©rie gonflĂ© en scope (ou du mauvais Michael Mann), Collision dĂ©roule avec une monotonie complète son programme : conflit raciste conscient ou inconscient aux consĂ©quences dramatiques jusqu'Ă rachat final lors d'une sĂ©quence "lyrique" bourrĂ©e de pathos et de violonades synthĂ©tiques. On arrive quoi qu'il en soit toujours dans le mĂŞme fossĂ© : les cons seront un peu moins cons, les gentils un peu plus lâches. L'humanitĂ© est grise, la moyenne (statistique et morale) est respectĂ©e ; Haggis tend ce miroir au spectateur qui n'aura aucun mal Ă s'y reconnaĂ®tre, et sortira du cinĂ©ma la conscience tranquille. Certainement pas meilleur, en tout cas.Christophe Chabert