Shaun of the Dead

Mercredi 31 août 2005

Plus qu'un simple hommage, Shaun of the Dead s'impose au fil de sa vision comme l'une des meilleures relectures du mythe cinématographique de l'invasion zombiesque. Et sous l'angle de la comédie romantique, qui plus est.François Cau

On n'y croyait plus. Près d'un an et demi après le carton amplement mérité de leur film, Edgar Wright et Simon Pegg se voit enfin gratifiés d'une sortie salle en France, "astucieusement" calée dans la foulée du Land of the Dead de Romero (dans lequel ils font d'ailleurs une courte apparition en morts-vivants, vous pouvez les voir sur l'affiche). Et ce n'est que justice : le succès surprise du film aux USA (sorti à quelques semaines d'intervalle de L'Armée des Morts) aura grandement participé au retour en force du film de zombies dans le cœur d'albâtre des studios hollywoodiens. Les premières minutes laissent pourtant craindre le pire : le film démarre sur un morceau piqué à la bande-son de Snatch, film dont on retrouvera d'ailleurs ici quelques gimmicks visuels. Mais rassurons-nous illico : loin du style vain, tape-à-l'œil et goguenard de Guy Ritchie, Shaun of the Dead plonge dans les genres qu'il interroge avec un respect et un talent autrement plus affirmés. De quoi ravir à la fois les amateurs éclairés de bonnes comédies romantiques (le film emprunte quelques acteurs de Love Actually) et les fans hardcore de cinéma gore (autant prévenir tout de suite les âmes sensibles, le film ne lésine pas sur la violence graphique). Le dérisoire des mortsDans leur série télé Spaced, Edgar Wright et Simon Pegg extrapolaient d'épisodes en épisodes les vies fantasmées d'une bande de branleurs, en s'inspirant surtout de classiques du cinéma, bis ou non. Leur premier long métrage est le prolongement parfait de cette approche, faite de décalage révérencieux et de non-sens savoureux et repose sur une idée a priori aussi stupide que géniale : mélanger le film de zombie et la comédie romantique. Mais s'il suffisait de faire des additions de genres improbables pour obtenir un bon film, Luc Besson serait un grand cinéaste. Une grande partie du charme de Shaun of the Dead tient justement à une habile superposition des deux aspects (quand le héros présente enfin sa copine à sa mère, c'est après avoir éclaté le crâne d'un bon nombre de morts-vivants), mais le film emporte l'adhésion par la recréation permanente, et entièrement originale, du monde chaotique naissant de la situation. Disons-le, Shaun of the Dead recèle son lot de gags et de séquences cinématographiquement incroyables, dont la plus parlante est un long plan-séquence voyant Shaun, encore bourré de la veille, marcher le long d'une rue infestée de zombies sans rien remarquer. Un plan à la fois hilarant et terrifiant, qui témoigne des soins égaux apportés à tous les aspects du récit. Dans ce choc permanent des genres, Simon Pegg, l'excellent interprète de Shaun, nous fait osciller entre rire, tension et émotion, et nous donne en tout cas envie de le revoir au plus vite. Shaun of the Deadd'Edgar Wright (GB, 1h39) avec Simon Pegg, Nick Frost...