Playtime
Parmi les invités prestigieux de la MC2, on compte le doublé gagnant de Jérôme Deschamps et Macha Makeïeff, avec leurs variations opportunes sur Mozart et le dernier prolongement de leur "veine Deschiens". Preview pleine d'espoir du premier spectacle, assortie d'une critique du second. FC
Mozart Short Cuts est la jonction bien pensée du travail de recherche de Laurence Equilbey, et de sa symbiose avec l'œuvre des deux metteurs en scène. Grande découvreuse de chefs-d'œuvre classiques oubliés, Laurence Equilbey a rassemblé pour cette création moult travaux inachevés ou incomplets de Mozart, en fonction de leur potentielle corrélation entre eux. Deuxième phase : Makeïeff et Deschamps s'emparent de ces correspondances pour créer de toutes pièces une scénographie à même de faire le lien. Ils optent pour un décor reproduisant les atours d'un hall d'hôtel bourgeois, dont l'esthétique évoque fatalement le style désuet qui leur sied tant, faisant une nouvelle fois du pied au spectre de Jacques Tati ; et ils choisissent de faire reposer l'essentiel de la cohérence narrative sur les épaules d'un majordome observant les événements avec distance (campé par leur vieux complice Robert Horn, l'un des comédiens principaux de C'est Magnifique). De quoi satisfaire tant les amateurs du génial compositeur que ceux des Deschiens.Le BureauUltime temps fort de cette saison de la MC2, Les Étourdis devrait combler les attentes de leurs fans télévisuels et / ou théâtraux. Le spectacle transpose l'univers sciemment décalé des Deschiens dans le monde du travail, avec comme principale idée celle de la répétition à tout va. Effets scéniques, phrases rabâchées jusqu'à l'ivresse, tableaux se répétant tels les hoquets d'un alcoolique de tele-novelas, le système tend parfois à agacer (les élancées vocales stridentes de l'excellent Jean Delavalade finissent par vous vriller les nerfs). Le propos s'affichant avec une telle clairvoyance, on se concentre sur les performances toujours aussi millimétrées des interprètes, sur la pertinence des interludes musicaux, sur telle trouvaille de jeu venant rompre une mécanique par ailleurs très bien huilée, marque de fabrique des metteurs en scène. On regrette que l'héritage circassien ne s'exprime plus que par lapsus, mais on savoure, malgré la lassitude naissante, cette magie toujours présente dans l'ensemble de la pièce. L'un des mantras originels de la Compagnie des Indes, qu'on pourrait résumer sommairement (et assez injustement) par "faire du laid avec du beau", porte invariablement ses spectacles vers de nobles hauteurs. Il serait regrettable que le repli systématique derrière cette formule n'engendre la lassitude des spectateurs les plus fidèles, comme celle des créateurs de ces formes aussi recommandables.Mozart Short CutsConception musicale et direction de Laurence Equilbey, mise en scène de Jérôme Deschamps et Macha Makeïeffles 15 et 16 novembre, au Grand Théâtre de la MC2Les Étourdis Mise en scène de Jérôme Deschamps et Macha Makeïeffdu 5 au 9 juin, au Grand Théâtre de la MC2