Le patrimoine fait l'événement

Mercredi 4 février 2009

Analyse / C'est le paradoxe le plus étrange de cette grande mutation cinématographique. Alors que le cinéma contemporain se jette à corps perdu dans les nouvelles technologies (3D, motion capture, cinéma digital), le cinéma d'hier sort lentement des cinémathèques et des rayons DVD pour retrouver le chemin des salles commerciales. La pérennité sur les écrans du GRAC de la Ciné-collection, les séances à succès du Comœdia autour du cinéma des années 70 et quelques belles reprises de films éternels (Cría Cuervos, Barry Lindon, Blade runner, Lola Montès) ont prouvé l'engouement d'un public pas aussi obnubilé par la nouveauté qu'on aurait pu le croire. Certains distributeurs, Carlotta films en tête, sont même devenus des acteurs majeurs de ce renouveau, alternant classiques récents et authentiques redécouvertes (comme le film de Paul Newman, De l'influence des rayons gamma sur le comportement des marguerites). Tandis que se prépare le futur festival du Grand Lyon programmé par l'Institut Lumière, dont les infos sont révélées au compte-goutte (la confirmation d'un prix Lumière aux contours toujours mystérieux, un nom échappé comme un lapsus de la bouche de Gérard Collomb lors de l'inauguration des studios Lumière, "L'amour du cinéma", et des dates, du 13 au 18 octobre), la surprise est venue du côté de Gaumont. La firme à la marguerite a lancé en janvier le Gaumont Ciné-club digital, profitant conjointement de cette envie de redécouvrir des classiques sur grand écran et du développement de la projection HD dans ses cinémas et ceux du groupe Pathé. À Lyon, c'est le Pathé Vaise qui propose cette séance mensuelle, où un film du catalogue Gaumont est projeté dans une copie restaurée en numérique. Cette première saison va donc des Tontons flingueurs à La Folie des grandeurs en passant par le plus rare Razzia sur la schnouf. Certes, on est dans une programmation très «cinoche du samedi soir», avec ses stars inaltérables (De Funès, Ventura, Gabin) et ses cinéastes populaires (Lautner, Verneuil, Oury, Autant-Lara, Decoin). Mais le fait d'exhumer dans un multiplexe ce qui constitue un réel patrimoine hexagonal montre bien que l'événement ne se fait plus seulement avec le présent de l'industrie, mais aussi avec le passé du septième art. CC