Shannon Wright : Abraser la mélancolie pour la rendre à la lumière
Rock indé / Depuis 1996 Shannon Wright construit une œuvre en clair-obscur et dont chaque chapitre incarne une étape ultérieure vers la perfection.

Photo : Shannon Wright ©Jason Maris
Après deux disques avec Crowsdell encapsulant parfaitement l'esprit underground des années 90 - dont le premier produit par un certain Stephen Malkmus de Pavement - à la fin de la décennie Shannon Wright fait le choix drastique d'abandonner le groupe et New York pour rejoindre la Caroline du Nord, optant pour une vie plus au calme. Ici, elle commence à esquisser une carrière solo, se mesurant non seulement avec la guitare mais également avec le violoncelle, l'harmonium, le piano et la batterie : un rapport omnivore qui traversera tous ses disques jusqu'au récent Reservoir of love.
Après cinq albums sur Quarterstick, label frère de l'iconique Touch and go, en 2004 les Français Ici, d'ailleurs et Vicious Circle s'allient afin de produire son saisissant disque avec Yann Tiersen. L'invitation que Philippe Couderc lui avait faite en 2001 sera enfin acceptée et sept autres perles sortiront sur le label de Bordeaux.
Sa discographie fait preuve d'une intransigeance dramatique, d'une mise à nue fascinante et envoûtante d'une âme sensible, en mesure de passer de la folk imprévisible (Flight safety) à l'hypnotisme nocturne (Maps of Tacit, Dyed in the wool), des sons abrasifs (Over the sun) à la lumière (Let in the light, Honeybee girls), du rock puissant, avec des nuances hardcore (Secret blood), noise (In film sound) ou teintées d'un décadentisme ancien (Division), à la mélancolie féerique (Providence, brève heptalogie pianistique de 2019). Avant de parvenir à son treizième disque, ce Reservoir of love qui perce la noirceur pour restituer un inattendu faisceau de lumière embrasant son public.