dEUS soit loué

Rock / Après une pause de près de dix ans, dEUS sort "How to replace it", album que le groupe belge ne défendra sur scène qu’à Paris et Grenoble. Chance ! 

dEUS n’a pas joué à Grenoble ou environs depuis 2008. Et n’avait malheureusement pas sorti d’album particulièrement notable après le très bon Pocket Revolution (2005). Chose réparée avec le récent How to replace it, qui nous ramène aux grandes heures du groupe, à savoir la période à cheval entre les 90’s et les 2000’s, quand dEUS était l’un des groupes indie-rock les plus importants, non pas de sa Belgique d’origine, mais du monde, osons le dire.

Des art-rockers qui n’avaient pas froid aux yeux, et tentaient un peu tout ce qui leur passait par la tête, avec une réussite insolente et un démarrage en trombe : leurs trois premiers disques sont tout bonnement indispensables. Worst case scenario (1994), In a bar, under the sea (1996) et le monumental The Ideal Crash (1999) envoyaient valdinguer tous les standards et cadres d’un rock indé devenu trop plan-plan. Pour retrouver la substantifique moelle d’un joyeux foutraquisme héritier de Zappa, Captain Beefheart, Talking Heads, Tom Waits et autres freaks de qualité, amateurs des juxtapositions flamboyantes et d’introspections rocambolesques.

Bordel ambiant et rageur, poésie en suspension illuminée, envolées baroques aux enchevêtrements savants : dEUS était maître dans l’art du grand écart en un claquement de doigts, sans jamais partir dans l’indigeste pizza 4 fromages (supplément ravioles). Alors même que vous pouviez trouver ici une ligne de basse funkisante, ici une batterie hip-hop, ici un violon inquiétant, par là des harmonies vocales en équilibre précaire et là-haut une déflagration bruitiste. Toute leur flamboyance débridée est déjà synthétisée dans le titre Fell off the floor man de 1996.

Retour en grâce

Aucun autre groupe que dEUS ne joue du dEUS. C’est ça qu’on aime, et que l’on avait un peu perdu avant ce How to replace it : le titre éponyme ouvre les hostilités avec une poésie soufflée sur lit de percussions nimbées de synthés lointains, saupoudrés d’une guitare dévariée répondant aux incantations habitées du leader et touche-à-tout Tom Barman. Lequel, après une phase personnelle difficile, nous revient manifestement plus volontaire que jamais. Must have been new enchaîne sur un registre plus balisé dans l’approche, une pop song aux accents british. Mélanger des ambiances Vladimir Cosma qui bifurquent sans prévenir vers de sombres territoires à la Suuns ? C’est possible avec Man of the house, qui fait rapidement penser à l’efficacité redoutable du tube Instant Street (oui, celui sur lequel tous les fans historiques vont verser leur petite larme syndicale). Clairement la claque de l’album.

En revanche, le fort peu enthousiasmant et trop facile 1989 fleure trop bon la publicité 80’s pour une marque de boisson à déguster sur une plage au sable trop blanc et au ciel trop bleu. Et marque le ventre mou de l’album avec les plan-plan Faux Bamboo, Dream is a giver et Pirates, qui naviguent entre easy-listening-France-Inter et mélopées inoffensives et éco-bio-citoyennes de chez Nature et Découvertes. 

Plaisirs simples

Il faut attendre Simple pleasures pour un rafraîchissant retour aux sources du groupe : de la bidouille déconstruite et enjouée dans laquelle on joue les matchs les uns après les autres sans se poser de question, l’essentiel ce sont les 3 points. Des plaisirs simples, mais efficaces : une autre grande réussite du disque. Never get you high navigue entre deux ou trois eaux sans jamais sembler trouver son chemin alors que Why think it over (Cadillac), emmené par sa basse mordante, se déploie comme un lendemain de cuite dans lequel Captain Beefheart et Devo danseraient au bord d’une piscine remplie de rosé, en écoutant du M83. Rosé dont Love breaks down a fait une overdose : le slow au piano nappé de violons à la crème, on aurait largement pu se l’éviter, les gars. Franchement, c’est presque aussi indigeste que la chanson de Prefab Sprout (ahahah, non mais sérieux) du même nom.

Il est temps de clôturer avec Le Blues polaire : mélange improbable de guitare-fuzz-sauvage et de clavecin, pour une chanson en français qui n’est pas sans rappeler Rodolphe Burger. Bref, dEUS construit toujours ses albums comme Gaudí sa cathédrale : foutraque et habitée. 

dEUS + Affection Place vendredi 24 mars à 20h à la Belle Électrique, de 31€ à 36€

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