Phèdre électrique

L’impressionnante Anne Delbée met en scène son amour pour Phèdre, personnage illustre de la tragédie. Ça donne une création d’une intensité remarquable, à découvrir jusqu’à vendredi à l’Amphithéâtre. Aurélien Martinez

Anne Delbée l’annonce non sans ironie : l’écriture de Jean Racine est semblable au foot, une fois que l’on en comprend les règles, on ne peut plus s’en passer. Dans un autre genre, elle la compare à la danse classique et ses codes implicites. « Aujourd’hui au seuil de la vieillesse et grâce à cette indéfectible complicité avec le poète, au moment où je ressens combien la Tragédie doit renaître sur les plateaux, dans toute sa force, dans toute sa violence, dans sa splendeur, c’est à Vous, Vous le public que j’ai le désir de dévoiler cet amour fou qui depuis tant d’années m’habite quotidiennement » écrit-elle au sujet de son projet né il y a de ça six mois, à l’Amphithéâtre, pendant la Nuit Racine. Un amour monstre pour le verbe racinien (elle travaille le sujet depuis vingt-cinq ans), en particulier pour Phèdre, l’un des personnages les plus forts de la tragédie. Phèdre victime ou coupable se demande Anne Delbée, au cours de deux heures de spectacle intenses où elle mêle les alexandrins à ses propres réflexions (le texte est d’elle). Mais attention, on est bien loin ici de la simple explication de texte façon lycéens en plein bac de français : la comédienne met en scène sa relation avec Phèdre, l’interprète avec grandeur, vivant pleinement les mots. Accompagnée de deux musiciens, elle transcende la tragédie racinienne pour l’offrir au public, avec force. Si certains resteront sans doute sur le côté (on conseille aux néophytes de se pencher avant la représentation sur le qui est qui dans la galaxie Phèdre), le voyage est littéralement saisissant pour peu que l’on accepte de se laisser porter, quitte à décrocher quelques fois (le spectacle, hésitant par moments, demande à être rodé). Un voyage sensitif en somme, où le langage devient une arme de résistance.

JEAN RACINE OU LA LEÇON DE PHEDRE
Jusqu’au vendredi 6 novembre à 20h30, à l’Amphithéâtre (Pont-de-Claix).

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