ESS / La Chambre Régionale de l'Économie Sociale et Solidaire (CRESS) d'Auvergne-Rhône-Alpes perd sa subvention régionale. Une décision justifiée par la volonté de supprimer les "structures intermédiées", au profit d'un soutien direct aux entreprises. Une approche qui interroge sur l'avenir d'un secteur qui représente pourtant 10 % de l'emploi en France.
La majorité régionale dirigée par Fabrice Pannekoucke (LR) a annoncé en ce début d'année supprimer sa subvention de 230 000 euros allouée à la Chambre régionale de l'économie sociale et solidaire d'Auvergne-Rhône-Alpes.
Cette coupe budgétaire s'inscrit dans une réduction globale de 1, 7 million d'euros alloués au secteur de l'économie sociale et solidaire (ESS) dans la région. Des structures telles que l'AGF SCOP (200 000 euros en 2024), France Active (1, 04 million d'euros en 2024) et le Dispositif Local d'Accompagnement (220 000 euros en 2024) sont également touchées.
La CRESS d'Auvergne-Rhône-Alpes accompagne les entreprises de l'ESS, fédérant coopératives, associations et mutuelles qui privilégient une logique d'intérêt général plutôt que lucratif. L'ESS repose sur des principes de solidarité, de gouvernance démocratique et de réinvestissement des bénéfices au service de projets collectifs. Ainsi la CRESS joue un rôle central en fournissant des outils d'accompagnement, de formation et de mise en réseau aux structures engagées dans cette économie alternative.
« Couper ces subventions, c'est fragiliser des milliers d'emplois et nier l'impact économique et social de l'ESS dans notre région »
Pour Nicolas Planchon, co-président de la CRESS Auvergne-Rhône-Alpes, cette décision met en péril l'accompagnement de nombreuses structures. « Couper ces subventions, c'est fragiliser des milliers d'emplois et nier l'impact économique et social de l'ESS dans notre région », s'indigne-t-il. En Auvergne-Rhône-Alpes, l'ESS représente près de 11 % de l'emploi salarié de la région, avec plus de 27 000 établissements employeurs et environ 330 000 emplois. « Elle répond à des besoins non couverts par l'économie classique, notamment dans les domaines de l'insertion, de la santé et de l'environnement » ajoute-t-il.
La suppression de cette subvention, qui représentait un quart du budget de la CRESS, entraîne des mesures significatives. Parmi elles, la fermeture du site Ambition ESS, une plateforme d'emploi spécialisée qui accueillait 50 000 visiteurs uniques par mois, ainsi que la suppression de la moitié des 13 postes au siège de la CRESS.
Nicolas Planchon affirme que la priorité est de préserver au maximum les actions menées sur le territoire. « Nous allons devoir procéder à des ajustements, mutualiser certaines missions avec d'autres acteurs et renforcer nos partenariats. Nous lançons aussi des appels aux soutiens extérieurs. Mais ces coupes ne nous affectent pas seulement : c'est tout un réseau de l'économie sociale et solidaire qui se mobilise déjà pour organiser une réponse collective. »
Par ailleurs, il dénonce une volonté politique plus large de marginaliser un secteur qui ne correspond pas aux priorités économiques de la majorité régionale : « On assiste à un désengagement idéologique, pas à une gestion pragmatique. Cette coupe budgétaire s'inscrit dans une tendance plus large de réduction des soutiens publics aux structures jugées trop éloignées des orientations économiques libérales défendues par la Région. »
La région assume son choix
Contactée, la Région assume pleinement cette coupe budgétaire, justifiée par une volonté de concentrer les fonds publics sur des dispositifs jugés plus efficaces. « Nous avons fait le choix d'un soutien direct aux entreprises de l'ESS plutôt que de financer des structures intermédiées », explique l'exécutif.
Les subventions auparavant allouées à la CRESS seront redirigées vers des dispositifs comme le Fonds régional d'investissement pour l'ESS ou l'accompagnement des SCOP et SCIC. La majorité régionale estime que l'ESS doit se structurer sur des bases plus autonomes et diversifier ses financements. « La CRESS n'a pas su démontrer une utilité suffisante justifiant son maintien », tranche la Région.
De son côté, Nicolas Planchon souligne l'incohérence du raisonnement régional : « Pour obtenir ces subventions, nous avons toujours dû prouver notre utilité et remplir des critères stricts. Aujourd'hui, on nous reproche une supposée inutilité alors que ces mêmes exigences existent toujours. C'est un non-sens. »