« Une SMAC doit aller vers les acteurs culturels, pas l'inverse »

Fort de ses multiples expériences dans l’univers de la musique, Julien Pickering a pris ses fonctions de programmateur au Fil de Saint-Étienne il y a un mois et demi. Nous l’avons rencontré dans ses nouveaux pénates, peu avant les vacances de Noël. Interview.

Sans nous fournir un CV détaillé, peux-tu nous expliquer un peu d’où tu viens ?

Pour moi, tout a commencé en 2002, dans le quartier de Luynes à Aix-en-Provence. Avec l’association dont je faisais alors partie, j’ai ouvert une salle de concerts de 300 places, Le Tribute, et j’en ai assuré la programmation et la direction. C’est dans cette salle que sont nées les Dub Station, que nous avons ensuite exportées dans la région marseillaise, à Paris, et finalement un peu partout. Je suis ensuite devenu manager d’artistes, pour Chinese Man ou Deluxe, entre autres.

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Qu’est ce qui t’a conduit à candidater au Fil ?

Je suis installé dans la région depuis 5 ans, à mi-chemin pile entre Saint-Étienne et Lyon. Depuis 2019, je cherchais une nouvelle porte d’entrée pour travailler de nouveau en salle… Parce que c’est ce que j’aime. J’adore l’énergie d’une salle de concerts, l’effervescence qui y règne. Tu accueilles des artistes en résidences, des concerts, un catering les soirs de live… Je suis aujourd’hui convaincu que la salle de concert est ma place. 
Du coup… Le poste de programmateur du Fil est arrivé à point nommé ! Je connaissais la salle pour y être passé plusieurs fois avec les groupes que j’accompagnais, et je connaissais un peu la ville, et certains de ses acteurs culturels : l’excellent disquaire Méli Mélodie, Face B, Mathieu de Dub Inc, pour ne citer qu’eux. Tout cela m’a incité à postuler.

Que t’inspire la ville justement, et n’est-ce pas difficile d’arriver à ce poste en ne la connaissant pas forcément de l’intérieur ?

En fait, je crois que venir de l’extérieur, pour occuper ce type de poste, c’est au contraire plutôt un atout : tu évites d’emblée toutes les affaires de copinage, c’est pas plus mal comme ça. J’ai des lacunes à rattraper sur la ville, c’est certain... mais les choses vont se faire petit à petit. Et puis, même de l’extérieur, c’est une ville qui me parait très intéressante et riche : elle me fait un peu penser à Marseille d’ailleurs, pour son effervescence, pour la foule de projets artistiques qui y sont menés, et parce qu’elle incarne une sorte de carrefour des migrations. Cette énergie-là me plait beaucoup.

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Tu es actuellement en train de prendre tes marques… Sais-tu déjà dans quelle direction va s’orienter ta programmation ?

Pour commencer, dès janvier, je veux prendre des rendez-vous avec toutes les structures et tous les acteurs du territoire, y compris celles et ceux qui pour l’instant ne veulent pas travailler avec le Fil, pour essayer de trouver les moyens de la collaboration. Pour moi, une SMAC doit aller vers les acteurs, et pas l’inverse. Avant même de donner une quelconque couleur à la prog, je veux avoir rencontré un maximum de monde, car ce sont ces rencontres, qui vont ensuite me guider. 
Cela dit, il y a d’ores et déjà une chose dont je suis certain : ici, je programmerai toutes les esthétiques musicales. Le line-up sera peut-être plus éclectique que ce que le Fil a pu connaitre jusque-là. Je dirais même… Plus coloré. À l’image de la ville, en somme.

Ton délire musical à toi, ce serait plutôt quoi ?

Ah ! Moi je suis attiré par les esthétiques plutôt vintage ! Le blues, la funk, l’afrobeat… Mais pour faire ce métier, on laisse majoritairement ses propres goûts de côté, on pense seulement au public.

Tu l’as dit un peu plus tôt, Sainté fourmille de projets artistiques et de jeunes artistes plein d’envie. Envisages-tu de t’impliquer dans leur mise en avant, en les programmant sur la scène du Fil ?

Avec Greg, qui s’occupe de l’accompagnement, nous allons en effet travailler ensemble, pour essayer de développer des projets. Et nous voulons également travailler avec le tissu local. C’est loin d’être évident, mais je crois fort qu’il faut que l’on aille chercher les jeunes groupes dans leurs repères, sans attendre qu’ils nous démarchent.

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La période n’est pas forcément très prospère pour le monde de la culture en général : les confinements ont coupé les salles de leur public, l’inflation fait hésiter une partie des spectateurs à engager une somme d’argent pour un spectacle… A Saint-Étienne, où les propositions sont nombreuses, il n’est pas forcément simple de parvenir à fédérer sur une date. La programmation seule, peut-elle remédier à cela ?

Non, la programmation va s’intégrer à un projet beaucoup plus global, qui concerne la salle en elle-même. Cela dit, elle est tout de même fondamentale. Le Fil a depuis toujours une image de salle très orientée sur le rock. Il faut absolument parvenir à casser cette image, pour ne pas se couper d’un public potentiel.

Et puis, l’idée est également de faire venir jusqu’à nous des spectateurs non-Stéphanois. J’ai entendu dire que, comme Sainté se trouve géographiquement entre Clermont et Lyon, elle passe après, notamment lorsqu’il s’agit de capter des publics sur certaines grosses dates. De mon côté, je vois plutôt le fait d’être à Saint-Étienne comme un avantage. On a un public à draguer en périphérie de Lyon, et même ailleurs, parce que la ville est plus simple d’accès que des villes plus grosses, parce qu’on ne met pas 2 heures pour la traverser, parce qu’il est plus facile de s’y garer … Nous devons, je pense, essayer de jouer cette carte-là également.

 

 

 

 

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