Théâtre : événements à venir

Mars ou crève

Mise en scène de Cécile Roux. Alors qu’il était destiné à être le premier homme à mettre le pied sur mars, le commandant Bob Jones va devoir partager la gloire avec Jean-Philippe Chiffon, un passager embarqué par erreur. Mais la question subsiste : a-t-il vraiment été embarqué par erreur ?

Mourir d'Aimer - Les Amants Maudits de Mai 68

Écrit par Fabrice Gauvin et Grégory Fostier, 2h15. Marquée par les mouvements populaires de contestation s'étant développés lors du mois de mai, l'année 1968 a bouleversé la France. Au cœur de ce contexte fragilisé, une histoire d'amour secoue également l'opinion publique, celle d'Emma, professeure de français, et Pierre, son élève lycéen voulant vivre leur amour.

Les 4 Mousquetaires

D'après Alexandre Dumas, par la compagnie La Douce, dès 8 ans, 1h10. Réarrangés en mode pop et coloré, les 67 chapitres de l'œuvre originale d'Alexandre Dumas se transforment en une nouvelle, frénétique, empruntant son humour aux Monty Python, le tout plongé dans l’univers des années 1980.

Biclou

Mise en scène de Nicolas Ramond, 50 min, dès 10 ans. Ode à la bicyclette, cette pièce interroge avec humour et poésie nos modes de vie et propose de faire du théâtre autrement, en faisant du vélo un acteur à part entière. Au centre de la scène, un tas de pièces de vélo. Le public assiste à son remontage par un mécanicien, personnage solitaire et nomade mêlant langage vélo et chiffres mystérieux, qui donne à voir la précision de ses gestes et son savoir‑faire qui réparent son vélo autant que lui‑même.

Notre avis : Le Lyonnais Nicolas Ramond n'a jamais eu peur d'emprunter des chemins escarpés du théâtre où la chute n'est pas exclue mais il reste toujours en selle. Ça marchera jamais était une variation joyeuse et frontale sur ses (supposés) échecs. Voici qu'il s'attelle au vélo et ce que signifie ce mode doux dans un monde en furie. La tournée se fera exclusivement en vélo-cargo ! Et ces deux premières représentations sont en plein air.

Process Comedy

De Quentin Lesaffre et Bertrand de Ruyver, mise en scène d'Olivier Maille, 1h15. À travers des anecdotes et des imitations, Process Comedy vise à apprendre au public à mieux se connaître et à mieux comprendre son entourage, à la maison comme au travail.

Nos paysages mineurs + En finir avec leur histoire

Texte et mise en scène de Marc Lainé, 2h50. Deux premiers volets d'une trilogie, ces deux pièces retracent la rencontre à bord d'un train de Liliane, employée de magasin et Paul, professeur de philosophie et futur écrivain. Si leurs origines sociales les opposent, ils vont s’engager politiquement et s’aimer avant de se séparer. La seconde partie, quant à elle, raconte leurs retrouvailles vingt ans plus tard, en 1992, au cours d'une balade de nuit dans les rues parisiennes au cours de laquelle ils échangent leurs désillusions post-soixante-huitardes.

Jeune qui veille

Texte de Lucie Vérot Solaure, mise en scène de Marie Demesy, 1h15, dès 12 ans. Dans un futur proche, en France ultramarine, Matilda s’est liée d’amitié avec Yan. Une nuit, les deux adolescents se retrouvent pour tenter de renouer avec le passé en s’essayant au spiritisme. Myrtha, une « vraie créole d'ici » surgit alors, peu de jours après sa mort. N'ayant été ni réclamée ni identifiée, elle pose un ultimatum aux deux jeunes : lui organiser une sépulture avant l’aube ou être hantés à jamais.

Passeport

Texte et mise en scène d'Alexis Michalik, 1h30, dès 12 ans. Issa, jeune Érythréen laissé pour mort dans la « jungle » de Calais, a perdu la mémoire. Alors que le seul élément tangible de son passé est son passeport, il entame une longue quête semée d’embûches afin d’obtenir un titre de séjour, entouré de compagnons d’infortune.

Notre avis : Adepte d'un théâtre tout en rebondissements, Alexis Michalik a, dans sa dernière pièce, gardé la formule qui fait le succès de son écriture en la plaquant sur un sujet très politique : le sort des migrants. Tout part d'un jeune Érythréen qui, après des violences dans la « jungle » de Calais, a perdu la mémoire. Avec une certaine efficacité, le récit remonte les fils de son histoire afin de les dénouer et d'émouvoir le public sans l'assommer - « ce n'est pas un théâtre militant ou documentaire, mais une histoire humaine, qui s'adresse à tous » écrit Michalik. Honnête.

La folle journée ou Le mariage de Figaro

D’après Beaumarchais, mise en scène de Lucile Lacaze, 2h, dès 14 ans. En 1784, Suzanne, femme de chambre, s’apprête à épouser l’intendant Figaro, mais son maître, le comte Almaviva, exige de déflorer la future mariée. Pour déjouer les plans de l’aristocrate, des alliances inattendues se forment alors que la Révolution se profile et que le comte s’accroche à ses derniers pouvoirs.

Nuit d'ivresse

De Josiane Balasko, mise en scène de Julie Hugon, 1h30, dès 14 ans. Tout oppose Simone et Jacques Belin, qui se rencontrent en fin de soirée dans un bistrot. Malgré leurs différences il se retrouvent dans l’ivresse, se racontent et s’inventent. Toutefois, le réveil risque d’être difficile.

Valentina

Texte et mise en scène de Caroline Guiela Nguyen, 1h20, dès 12 ans. Un jour, au retour de l’école, Valentina trouve un mot du médecin sur la table. C’est à elle que va revenir la lourde charge de le traduire à sa mère, atteinte d’une grave maladie du cœur, qui ne comprend que le roumain. Commence alors une histoire où la violence de l’institution hospitalière s’ajoute à celle du diagnostic, ainsi qu'à l’espoir secret que le mensonge peut transformer le réel.

Notre avis : Il était une nouvelle fois un spectacle généreux, populaire et émouvant de la metteuse en scène et autrice Caroline Guiela Nguyen qui, forte de nombreux succès (Lacrima, Fraternité, Saigon...), régénère à sa façon le monde corseté du théâtre public. Avec Valentina, elle raconte l'histoire d'une jeune fille roumaine qui doit traduire à sa mère, venue en France se faire soigner, des termes médicaux beaucoup trop lourds pour une enfant... Poignant.

Les collectionnistes

Mise en scène de Christophe Lidon. 1870, Paul Durand-Ruel, marchand de tableaux réfugié à Londres rencontre Claude Monet. De retour à Paris, ce dernier lui présente Renoir, Degas, Pissaro, de jeunes peintres dont il perçoit aussitôt le génie et la modernité. Enthousiasmé par le talent de ces artistes qu'on ne qualifie pas encore d'Impressionnistes, il achète sans compter jusqu'à ce que les huissiers frappent à sa porte.

Le porteur d'histoire

Écrit et mis en scène d'Alexis Michalik, 1h35. Par une nuit pluvieuse, au fin fond des Arden­nes, Martin Martin doit enterrer son père. Il est alors loin d’imaginer que la découverte d’un carnet manuscrit va l’entraîner dans une quête vertigineuse à travers l’Histoire et les continents. Quinze ans plus tard, au cœur du désert algérien, une mère et sa fille disparaissent mystérieusement.

Notre avis : Alexis Michalik est, depuis dix ans, l'un des auteurs et metteurs en scène français qui a le plus le vent en poupe - et plein de Molières sur sa cheminée. Faut dire que ses textes sont des puzzles qui tiennent en haleine le spectateur, qui le captivent littéralement. C'est le cas avec ce Porteur d'histoire, joué dans toute la France depuis sa création en 2013 (et parfois simultanément dans différentes villes grâce à plusieurs distributions), cascade de récits familiaux qui s'entremêlent comme autant d'épisodes de série. Pour, bien sûr, arriver au dénouement tant attendu. Diablement efficace.

Iphigénie à Splott

Écrit par Gary Owen, mise en scène de Georges Lini, 1h30, dès 14 ans. Dans cette réinterprétation rock and roll, Gary Owen met en scène l’héroïne antique Effie, une jeune femme sauvage, rebelle et gouailleuse, et la transpose à Splott, une banlieue de Cardiff au Pays de Galles, minée par le chômage et la précarité.

Notre avis : Un spectacle en forme d'uppercut. Avec Iphigénie à Splott, l'auteur gallois Gary Owen a écrit un monologue fiévreux et politique sur une jeune fille d'un quartier déshérité de Cardiff. Au bord de l'explosion, son héroïne défie la tragédie que la société lui promet. Sur scène dans une mise en scène rock de Georges Lini, la comédienne Gwendoline Gauthier est captivante et bouleversante.

The Brotherhood

Texte et mise en scène de Carolina Bianchi, déconseillé aux moins de 16 ans. Avec son collectif Cara de Cavalo, Carolina Bianchi ausculte les origines de la fraternité masculine et les raisons pour lesquelles la violence, les viols et les agressions sexuelles sont inscrits dans leur codes partagés et leur vocabulaire. Accompagnée de huit acteurs, elle relie à la dramaturgie les traumatismes et les origines de la misogynie, la sexualité en crise, et fait du théâtre un moyen de rendre possible un dialogue sur ces sujets difficiles.

Notre avis : Pour le deuxième volet de sa trilogie Cadela Força, Carolina Bianchi creuse le sujet du viol aussi intime que collectif. Puisqu'il nous regarde tous, elle prend sa casquette d'actrice et d'universitaire pour enquêter sur la violence masculine et comment les figures féminines ont été écrites, dessinées, filmées, assujetties, annihilées par leurs auteurs. Dans The Brotherhood, présenté pour sa première française à Lyon, elle ébranle profondément nos regards.

Pourquoi les poules préfèrent être élevées en batterie

Dans cette nouvelle pseudo-conférence, Jérôme Rouger endosse le rôle du professeur Rouger, directeur de l'école d'agriculture ambulante, afin d'aborder avec humour les droits des poules et les conditions de vie des œufs. Entre informations scientifiques et réflexions absurdes, ce spectacle offre un regard aigu sur des problématiques actuelles, mêlant absurde et métaphysique.

Notre avis : Avec un détournement habile des codes de la conférence classique, l'auteur, metteur en scène et comédien Jérôme Rouger offre un drôle de spectacle rythmé qui s'autorise des digressions pour mieux amuser les spectateurs et spectatrices avant de revenir à son sujet. Lequel ? Les droits de la poule et les conditions de vie de l'œuf. Ou comment, sous couvert de jeux de mots, d'interpellations du public et de questions sans réponse, passer quelques messages bienvenus sur l'élevage intensif - d'où le titre ironique.

Quatorze, farce macabre !

Texte et mise en scène de Vincent Fouquet, 1h05, dès 12 ans. Un siècle après la Première Guerre mondiale, deux comédiens s’emparent de cette affaire, plongent la tête la première dans l’infernal mécanisme des jeux d’alliances et en révèlent toute la cruelle absurdité, le tout dans une mise en scène efficace conjuguant humour et rigueur historique.

Personne n'est ensemble sauf moi

Mise en scène de Clea Petrolesi, par la compagnie Amonime, 1h15, dès 11 ans.

Notre avis : Quelle belle surprise que ce spectacle titré avec une phrase prononcée par un jeune autiste rencontré dans le cadre d'ateliers menés par la compagnie Amonine. L'autrice et metteuse en scène Clea Petrolesi a ainsi conçu un spectacle centré sur de jeunes adultes en situation de handicap peu visible et donc incompris par celles et ceux que la société appelle les valides. Proche du théâtre documentaire, le résultat, qui questionne finement l'idée de normalité, est à la fois bouleversant et très drôle. Énorme coup de cœur.

Voir clair avec Monique Wittig

D’après Monique Wittig, Sarah Ahmed, Audre Lorde, Adrienne Rich et Elsa Dorlin, mise en scène d'Adèle Haenel, 1h, dès 16 ans. Caro Geryl et Adèle Haenel, les deux moitiés du duo musical DameChevaliers, s'emparent du texte La pensée straight de Monique Wittig, figure de proue du Mouvement de Libération des Femmes, du lesbianisme radical, et pionnière des études de genre. Pendant une heure, autour d'un feu, les artistes et spectateurs échangeront pour réfléchir ensemble sur ses écrits.

Notre avis : Après un début de carrière flamboyant au cinéma, la comédienne Adèle Haenel s'épanouit désormais sur les planches, notamment aux côtés de Gisèle Vienne. Cet automne, elle s'essaiera pour la première fois à la mise en scène en partant du texte La Pensée straight (1992) de Monique Wittig, figure du féminisme lesbien. Un spectacle annoncé entre performance et musique à découvrir dans le cadre du Festiv·iel de la Croix-Rousse, à la programmation passionnante et engagée.

Bovary Madame

D'après Gustave Flaubert, mise en scène de Christophe Honoré, 2h45, dès 15 ans. Sur la scène du théâtre, Christophe Honoré mêle le cirque et le cinéma pour donner corps aux Mœurs de province décrites par Flaubert, et réinterprète l'histoire d'Emma Bovar, coincée dans une petite ville de province et son mariage sans éclat, qui ne renonce pourtant pas à ses aspirations romantiques.

Notre avis : Le cinéaste Christophe Honoré aime les auteurs et les autrices, surtout quand il les amène au théâtre. Lui qui, en tant que metteur en scène, a déjà approché le courant du Nouveau Roman, le monument Marcel Proust ou encore certaines figures littéraires tragiquement mortes du sida, revisitera, dans son prochain spectacle et avec des interprètes fidèles (dont Ludivine Sagnier), le mythique Madame Bovary de Flaubert. Création mi-septembre en Suisse avant une tournée en France.

Annette

Mise en scène de Clémentine Colpin, 1h50, dès 13 ans. Il y a huit ans, la metteuse en scène belge Clémentine Colpin fait la connaissance d’Annette, deux fois plus âgée qu'elle. Cela bouleverse son rapport au monde : indomptable, emplie d’un insatiable désir de liberté, Annette a toujours fini par se défaire des rôles de femme, mère, secrétaire, épouse… dans lesquels elle était enfermée pour se réinventer sans cesse. Sur scène, elle rejoue sa vie et se raconte à cœur ouvert, sans tabou, de son enfance dans les années 1950 à sa mort rêvée.

Notre avis : Il faudrait ne rien dire de cette création qui a fait - à juste titre - l'évènement dans le Off d'Avignon cet été, si ce n'est que la créatrice Clémentine Colpin a collaboré déjà avec les hétéroclites et talentueux Christiane Jatahy, Robert Cantarella, Jaco Van Dormael et qu'elle a été formée en Belgique et en Suisse. Elle a décidé de construire son spectacle autour de la septuagénaire Annette et la place au centre de la scène alors qu'elle n'est pas comédienne. Autour d'elle, une jeune troupe d'interprètes fait revivre celles et ceux qu'elle a côtoyés.

Numéro deux

D'après David Foenkinos, mise en scène de Sophie Accard, 1h30. En 1999 débutait le casting pour trouver le jeune garçon qui allait interpréter Harry Potter et qui, par conséquent, deviendrait mondialement célèbre. Des centaines de garçons furent auditionnés, pour qu'il n’en reste plus que deux. Ce spectacle raconte l’histoire de celui qui n’a pas été choisi.

Notre avis : C'est l'histoire d'un gamin qui a failli jouer Harry Potter au cinéma, sauf qu'il a été doublé dans la dernière ligne droite par Daniel Radcliffe. Ce Numéro deux doit donc regarder la réussite du numéro un de loin. Adapté par Léonard Prain et mis en scène par Sophie Accard, le roman fictionnel de David Foenkinos prend vie dans un spectacle efficace et captivant qui rencontre un succès mérité depuis sa création en début d'année à Paris dans le théâtre privé.

Goupil et Kosmao

D'Étienne Saglio, 40 min, dès 5 ans. Nouveau venu incontournable dans le monde de la magie, Étienne Saglio met en scène un renard rebelle et un magicien qui composent un duo cartoonesque aussi féérique que comique, entre music-hall et marionnette. La star, ce n’est pas le prestidigitateur, c’est l’animal.

Notre avis : Grand nom de la magie contemporaine, Étienne Saglio a conçu, avec Goupil et Kosmao (soit le nom de l'assistant renard et celui du magicien), une petite forme cabaret de 30 minutes destinée au jeune public (à partir de 5 ans) d'une inventivité et d'une intelligence folles. Ici, l'humour est le moteur du récit, porté par ce duo involontairement comique qui fait littéralement s'esclaffer les enfants. Et les plus grands.

Nos matins intérieurs

Mise en scène de Nicolas Mathis, écrit par Julien Clément, 1h05, dès 10 ans. Cette année, le Quatuor Debussy partagera la scène avec le collectif Petit Travers, pour un spectacle tout en équilibres et en suspensions ; imaginée comme un grand jeu de construction, la scène est constituée de grands cubes dessinant autant de paysages qu’ils offrent de situations de jeu, dix jongleurs et jongleuses accordent leurs rythmes et leurs gestes dans des tableaux d’unisson, alors que les membres du quatuor jouent les maîtres du temps, imposant les vitesses, les cassures et les durées.

La Machine de Turing

De Benoit Solès, d'après Hugh Whitemore et Andrew Hodges, mise en scène de Tristan Petitgirard, 1h30. Manchester. Hiver 1952. Suite au cambriolage de son domicile, le professeur Turing porte plainte au commissariat.  Il n’est d’abord pas pris au sérieux par les forces de l'ordre, mais sa présence n’échappe pas aux services secrets grâce à son acharnement pour briser l’Enigma, machine allemande d'encodage pendant la Seconde Guerre mondiale. Ce spectacle retrace sa vie et ses nombreuses contributions à développer ce qui deviendra l'informatique moderne.

Une pièce sous influence

Texte de Martin Legros, mise en scène de Sophie Lebrun et Martin Legros, 1h35. Deux couples rentrent du carnaval et se font face le temps d’une nuit. Anna, déguisée en mariée zombie annonce à son mari qu’elle a invité les acheteurs de leur maison à venir boire un verre alors qu’ils les détestent… Au milieu des confettis, commence alors une nuit de confessions et de révélations entre ces deux couples que tout oppose.

Notre avis : Une mariée dans une robe ensanglantée et un homme dans une parure de chevalier : voici Anna et Mathias tels qu'ils apparaissent d'entrée de jeu de ces 95 minutes toutes aussi tristes que drôles. Le couple a perdu son enfant il y a trois ans et s'apprête à vendre sa maison-mausolée à un autre couple qui débarque sur scène. Entre Ibsen et Lars Norén, la troupe du collectif caennais La Cohue sait parfaitement varier l'intensité des émotions pour absorber dans un sens de la fête indéniable les ressentis les plus sombres.

La guerre n'a pas un visage de femme

D'après Svetlana Alexievitch, mise en scène de Julie Deliquet, 2h30. Après Welfare, Julie Deliquet poursuit son travail documentaire en adaptant cette fois-ci le premier livre de la prix Nobel de littérature Svetlana Alexievitch sur les 800 000 femmes mobilisées dans la Grande Guerre patriotique, largement invisibilisées jusqu'en 1985 et la sortie de son essai, résultat de sept ans de travail.

Notre avis : Quand nous nous asseyons, elles sont déjà là, dans leur appartement communautaire. Svetlana Alexievitch, prix Nobel de littérature 2015, les a rencontrées individuellement et a fait de leur récit son premier ouvrage, censuré, au mitan des années 80. Julie Deliquet prend le relais pour sortir de l'ombre ces femmes ukrainiennes, biélorusses, russes qui ont combattu avec les armes de l'armée de l'URSS après la rupture du pacte germano-soviétique en 1941. Un grand spectacle d'une des meilleures metteuses en scène actuelles, déjà bluffante avec Welfare ou 8 heures ne font pas un jour récemment.

Le bruit des arbres qui tombent

Mise en scène de Nathalie Béasse, 1h30, dès 15 ans. Sur le plateau, une bâche devient mer ou ciel, les corps dansent et racontent quand les mots échouent : quatre membres d’une même famille s’essaient à tenir debout, au bord de leurs failles. Entre chutes, élans, souvenirs et silences, tout se mêle et la nature s’infiltre, discrète et insistante.

Notre avis : À la fois plasticienne et comédienne, Nathalie Béasse revient avec un spectacle de 2017 où, comme souvent dans son travail, des personnages sont de passage, un peu égarés. Ils racontent leurs états, leurs rencontres quand ils ne dansent pas ensemble l'espace de quelques instants. Les corps, enrobés dans des costumes très élégants et soignés, apportent une légèreté souvent contradictoire avec ce bruit des arbres qui tombent. La grande classe.

Blanche-Neige, histoire d'un prince

Écrit par Marie Dilasser, mise en scène de Michel Raskine, 1h, dès 8 ans. Le couple princier bat de l’aile, le royaume est dévasté, la biodiversité en danger à force de fêtes et de guerres. Ces héros mélancoliques et joyeux clopent, chantent, se disputent et divaguent en tricotant. En un tourbillon burlesque, le spectacle plonge dans un récit moderne interrogeant les archétypes, le patriarcat, le féminisme et l’environnement.

Notre avis : Une histoire très connue comme on ne nous l'a jamais racontée : avec Blanche-Neige, histoire d'un prince, l'autrice Marie Dilasser a livré un texte bourré d'intelligence et d'humour (Blanche-Neige rêve par exemple d'une aventure avec sa copine Peau d'âne) qui nous transporte des années après le fameux baiser. Le metteur en scène Michel Raskine en a fait un excellent spectacle pour tous (petits et grands) dans la droite lignée d'un théâtre généreux et inventif. On adore.

Le Cercle des poètes disparus

Mise en scène d’Olivier Solivérès, 2h. Première adaptation en France du film de Peter Weir, reprenant l'histoire de John Keating, professeur de littérature anglaise qui va pousser ses jeunes élèves à s’ouvrir à la vie, loin du carcan des conventions qu’incarne leur établissement.

Notre avis : Quand un film culte passe à la scène sans autre but que de raconter une fois de plus l'histoire, la circonspection peut-être de mise : que va apporter cette nouvelle version ? Dans le cas du Cercle des poètes disparus, film de Peter Weir sorti en 1989 avec Robin Williams dans le rôle d'un professeur de littérature tout sauf conventionnel, la réponse est : une savoureuse vivification ! Ce récit d'émancipation prend vie et corps sur le plateau avec justesse, grâce notamment à Stéphane Freiss dans le rôle-titre et à tout une série de jeunes comédiens épatants de fougue en guise d'élèves. Rien de révolutionnaire, certes, mais quel plaisir communicatif.

Absalon Absalon !

D’après William Faulkner, mise en scène de Séverine Chavrier, 5h15. Dans le Sud des États-Unis post-guerre de Sécession, Thomas Sutpen, un homme blanc rongé par la rancœur bâtit, à partir d’une unique pièce d’or, un domaine monumental qu’il baptise de son nom, Sutpen’s Hundred. Pour fonder sa dynastie, au sang le plus pur, il multiplie les épouses et les enfants dans un délire d’engendrement, mais échoue, dans l’inceste et le fratricide.

Notre avis : Après avoir présenté son excellent Ils nous ont oubliés en 2023 au TNP, Séverine Chavrier revient avec son intense adaptation de 5h du roman culte de William Faulkner qu'elle a créée au festival d'Avignon 2024. Sur le plateau, elle a tout mis : la maison et la voiture de Thomas Sutpen, cet enfant des basses couches de la société qui veut fonder un empire de plantations, mais aussi la moiteur du Mississipi et l'Amérique de la guerre de Sécession, la ségrégation et l'inceste. L'acteur Laurent Papot impressionne, le spectacle nous happe, quitte à parfois ne pas être complètement saisissable.

Zaï zaï zaï zaï

D’après Fabcaro, mise en scène de Paul Moulin, 1h. Fabrice est à la caisse d’un supermarché lorsque la caissière lui demande s’il a la carte du magasin, mais il ne la trouve pas. La caissière appelle la sécurité et Fabrice prend la fuite. En quelques heures, il devient l’ennemi public numéro un. Installés autour d’une grande table équipée de micros, une bande d’acteurs s’amuse comme des gosses à raconter cette histoire complètement déjantée, en faisant les voix et les bruitages.

Romancero queer

Texte et mise en scène de Virginie Despentes, 1h40, dès 15 ans. Après Woke, sa première expérience de mise en scène, Virginie Despentes est de retour avec Romancero Queer, qui se déroule dans les loges d’un théâtre public où huit acteurs sont rassemblés pour l’adaptation d’une pièce. La banalité de la tyrannie du metteur en scène les exaspère, puis les révolte et les soude.

Notre avis : Événement : l'autrice culte Virginie Despentes débarque cette saison à Lyon (à la Croix-Rousse, forcément) avec sa deuxième pièce qu'elle met en scène : Romancero queer. Un spectacle vivifiant et joyeusement imparfait, dans la lignée de ses réflexions et de ses combats (sa première pièce, écrite à huit mains, revendiquait fièrement le titre Woke), avec pour point de départ narratif le monde du théâtre et une histoire de metteur en scène problématique. Très métathéâtral.

Prendre soin

Texte et mise en scène d'Alexander Zeldin, 1h30. Au cœur de la nuit, dans une boucherie industrielle, cinq agents de ménage se rencontrent pour la première fois. Au moment de leurs pauses, ils bavardent, dans une scénographie d’une grande sobriété donnant toute la place aux acteurs et actrices.

Notre avis : Dans cette saison dense, on ose affirmer que c'est le spectacle que nous attendons le plus. Il y a quelques années, Alexandre Zeldin nous avait fait chavirer avec Love tant il aimait ses personnages plus qu'il ne collait sur eux un discours, intensément politique. Avec le théâtre, il rendait leur humanité à des allocataires en mal de logement gérés par les services sociaux anglais. Avec Prendre soin, autre volet de sa trilogie sur les inégalités, le Britannique s'attache aux travailleurs précaires, celles et ceux compressés par le programme économique à la tâche dit « Zero hour ».

La prochaine fois que tu mordras la poussière

D’après Panayotis Pascot, mise en scène de Paul Pascot. Dans le miroir d’une salle d’attente d’hôpital, face à son fils, un père apparaît et disparaît. Des deux, on ne sait pas qui sera le prochain à mordre la poussière.

Notre avis : Du roman à succès La Prochaine fois que tu mordras la poussière de son frère Panayotis Pascot, le metteur en scène Paul Pascot a sorti des passages saillants sur le rapport compliqué du jeune humoriste à son père. Dans une scénographie polymorphe, il a placé son comédien principal (Vassili Schneider à la création, Roméo Mariani pour la tournée) au centre de l'attention, le père (Yann Pradal) étant une présence presque fantomatique habilement convoquée, pour un spectacle subtil et émouvant.

(É)mouvoir

Mise en scène de Claire Petit et Sylvain Desplagnes, 30 min, dès 6 mois. À l’intérieur même d’un décor de forêt doux et enveloppant, les tout-petits pourront se déplacer, toucher, observer, écouter. Accompagnés par une marionnettiste, ils partiront à l'aventure au contact de la nature mouvante.

Notre avis : Régulièrement des compagnies s'attèlent à s'adresser aux bébés avec des moyens restreints, tant l'économie du théâtre jeune public est précaire. Voici que Claire Petit et Sylvain Desplagnes s'offrent les moyens d'une scénographie immersive pour les tout-petits dès 6 mois. De petites boules orange évoluent dans un monde ouaté blanc-crème et des végétaux s'animent, sortant des limbes ou tombant du ciel. De quoi faire ses premiers pas au théâtre avec une grande délicatesse.

Big Mother

Par la compagnie Mélody Mourey. Alors qu’un scandale éclabousse le Président des États-Unis et agite la rédaction du New York Investigation, la journaliste Julia Robinson voit sa vie vaciller dans la salle d’audience d’un tribunal quand elle croit reconnaître sur le banc des accusés son compagnon, mort quatre ans plus tôt. Son enquête croise celle de son équipe, et la petite cellule du New York Investigation se retrouve confrontée à un programme de manipulation de masse d’une ampleur inédite.

Notre avis : Nom bankable du théâtre privé français, Mélody Mourey a créé il y a deux ans un nouveau hit à succès. Soit une sorte de thriller dans le milieu journalistique états-unien, efficace dans sa narration et ses rebondissements (il est question d'un mort qui réapparaît subitement) et au plus près des enjeux démocratiques contemporains - le titre de la pièce est évidemment une référence à George Orwell. Voilà qui fait le job, même si c'est parfois aux forceps et à gros traits.

La vie secrète des vieux

Mise en scène de Mohamed El Khatib, 1h10, dès 15 ans. Après ses précédents succès au Théâtre de la Croix-Rousse, Mohamed El Khatib est de retour en invitant des femmes et des hommes âgés de 75 à 102 ans pour partager leurs histoires de coeur. Dans cette performance drôle et touchante, ces anciens évoquent avec sincérité leurs aventures sentimentales et intimes, passées ou présentes.

Notre avis : Raconter La Vie secrète des vieux, et notamment leur rapport au désir, avec sur le plateau des « vrais vieux », c'est ce qu'a entrepris le metteur en scène et auteur Mohamed El Khatib, grande figure d'un théâtre documentaire enrichi par la fiction. Le résultat est à la fois touchant, drôle, politique et, surtout, empreint de la fragilité et de la mélancolie de la fin de vie, l'une des interprètes amateurs étant décédée depuis la création en 2024.

L'Abolition des privilèges

D’après Bertrand Guillot, mise en scène d'Hugues Duchêne, 1h15. Après avoir parlé de la politique actuelle, Hugues Duchêne plonge au cœur de la nuit du 4 août 1789, lorsque des jeunes députés sont venus à Versailles pour abolir les privilèges des bien-nés, un moment fondateur de la nation française.

Notre avis : De ce moment fondateur qu'est la fameuse nuit du 4 août 1789 ayant permis L'Abolition des privilèges, le metteur en scène Hugues Duchêne a fait un spectacle survolté pour un comédien. Un pan de l'histoire française réanimé façon one-man-show, Maxime Pambet changeant de rôle en quelques secondes pour enflammer un discours, rejouer un affrontement, délivrer une anecdote... Captivant.

Les gros patinent bien

De Pierre Guillois et Olivier Martin-Salvan, 1h20, dès 10 ans. Comme des Laurel et Hardy des temps modernes, un homme en costume trois pièces passe tout le spectacle assis, tandis qu’un autre, en maillot de bain, s’agite autour de lui, brandissant des centaines de cartons racontant un voyage imaginaire à travers le monde. Il fait ainsi défiler des paysages, des personnages et même des animaux croisés au cours de cette drôle d’épopée. 

Notre avis : Un gros homme, statique sur scène, se lance dans un impressionnant voyage grâce à un maigre acolyte qui matérialise avec des cartons tout un tas d'accessoires, de paysages, de compagnons de route... Signé Olivier Martin-Salvan et Pierre Guillois, Les Gros patinent bien, cabaret de carton est un bijou burlesque au succès phénoménal mérité depuis sa création en 2020. Interview de Pierre Guillois à lire sur notre site (« faire marrer les gens, c'est notre travail ! » nous dit-il).

Marius

D'après Marcel Pagnol, mise en scène de Joël Pommerat, 1h20, dès 12 ans. Les affaires du café‑boulangerie de César vont plutôt mal, les clients se font rares et son fils Marius n’a guère envie de reprendre le commerce. Partagé entre son envie de prendre le large et son amour pour Fanny, une amie d’enfance, le jeune homme se demande s'il faut tout quitter au risque de tout perdre, ou rester et honorer son devoir de fils.

Notre avis : Joël Pommerat revient à Lyon avec Marius, adaptation du texte de Marcel Pagnol portée par des interprètes professionnels et d'anciens détenus rencontrés lors d'ateliers en prison. En artisan précis du théâtre, il a dirigé ce petit groupe hétéroclite avec finesse, respectant la nature de chacun, pour composer un spectacle à plusieurs niveaux de lecture qui se déploie magistralement et avec fragilité. À noter que Pommerat sera également au TNP fin novembre avec son nouveau conte Les Petites Filles modernes.