Avril
Pour son passage au long, Gérald Hustache-Mathieu tourne en rond autour de ses obsessions esthétiques, et s'en tire de justesse en gardant de bout en bout un regard candide et énamouré sur ses personnages.François Cau
Pas facile de se retrouver dans les chaussures de ce jeune cinéaste local. Un César du court pour son Peau de Vache, une bardée de récompenses pour La Chatte Andalouse, de quoi faire naître une attente démesurée pour son passage au long. Pourtant, en interview, notre homme semble exhaler la quiétude, la pleine et saine conscience de n'avoir pas vraiment rendu une œuvre transpirant l'urgence cinématographique, mais plutôt un premier essai en forme d'énième défrichage de ses aspirations filmiques. Pas étonnant, dès lors, de retrouver de grandes concordances avec ses précédentes tentatives : la muse Sophie Quinton en jeune sœur pas encore prête à prononcer ses vœux définitifs, des rebondissements narratifs bigger than life, une douce atemporalité enveloppant d'une brise mutine les frasques de corps rougissant de leur promiscuité... L'univers de Gérald Hustache-Mathieu devrait séduire ceux qui le découvrent, agacer les réfractaires au positivisme à tout crin, et laisser sur leur faim ses amateurs avides de nouveaux territoires dramatiques.Plus belle la vieSoit un récit peu soucieux de ses ellipses béantes et de ses facilités narratives : avant de s'isoler dans une vie de réclusion, la jeune Avril apprend qu'elle a un frère. S'enfuyant, elle crève un pneu de son vélo. Là , un commis tatoué sorti d'une pub Hugo Boss propose de l'emmener jusqu'en Camargue dans sa zolie camionnette (car après tout, il a bien mérité des vacances). Sur place, l'improbable duo percute que la copine du frangin est un mec. Puis vient le temps des rires et des chants, des baignades, des confessions, des films Super 8, des effluves de whisky (hi-hi !), des effleurements... Et encore, le réalisateur a zappé une sous-intrigue se focalisant sur le passé de la sœur campée par Miou-Miou, évitant à son film (de son propre aveu) une mise en abyme lourdingue. Le film y gagne en délicate abstraction, et parvient du même coup à justifier son atmosphère au charme suranné. On échappe aux relents nostalgiques pavant le cinéma français actuel de curieuses intentions, le procédé est même (discrètement) moqué. D'où une certaine indulgence face à ce film bancal, tout de même un rien trop poli dans sa singularité. Les tribulations d'Avril semblent en effet tester votre seuil de tolérance au romantisme bucolique jusqu'à sa "surprenante" conclusion, entre dérobade absurde et promesse d'en avoir fini avec les préoccupations de cinéaste se cherchant encore une bonne raison de filmer. Le prochain opus du jeune Hustache-Mathieu reste à surveiller. Avrilde Gérald Hustache-Mathieu (Fr, 1h38) avec Sophie Quinton, Nicolas Duvauchelle...