V pour Vendetta

Mercredi 26 avril 2006

de James McTeigue (ÉU, 2h10) avec Natalie Portman, Hugo Weaving...

On appréhende déjà l'accolage hâtif du qualificatif "culte" à cette adaptation bancale de l'excellent comics d'Alan Moore (voir le zoom juste à côté), retraçant le combat d'un anonyme masqué, "V", pour renverser le régime d'une Angleterre devenue fasciste à la suite d'une crise mondiale ayant plongé la planète dans le chaos. Certes, la réalisation de James McTeigue, poulain des frères Wachowski (réalisateurs de la trilogie Matrix, et ici producteurs exécutifs), est souvent flamboyante, et la prestation de Natalie Portman en protégée dubitative de V plus d'une fois convaincante. OK, la transcription littérale de certains passages du comics aboutit à un certain nombre de climax particulièrement scotchants, et la trame d'ensemble est à peu près respectée. Mais on ne nous enlèvera pas de l'esprit qu'une fois de plus, les frères Wachowski se sont bornés à faire du cinéma "Canada Dry", réduisant le subversif contenu initial à un poussif enfonçage de portes ouvertes, plus à même de satisfaire les fantasmes de rébellion du teenager de base. L'opposition ambiguë entre terrorisme anarchiste et dictature fasciste se transforme ainsi en un consensuel soulèvement populaire contre un régime totalitaire (avec au passage quelques clins d'œil cinglants au gouvernement Bush), et les passages les plus dantesques du comics (le trip sous LSD de l'inspecteur Finn dans un camp de concentration...) se voient tout simplement supprimés. Enfin, dès que le film sort un tant soit peu des rails, c'est la bérézina totale : V se retrouve en tablier à préparer des œufs au plat, ou se compromet dans des pirouettes câblées hors de propos. De même pour le camp adverse d'anonymes donc inquiétants individus dans le comics, ici métamorphosés en bande de simili dignitaires du IIIe Reich, avec une croix de Lorraine en guise de croix gammée (sic). Résultat, la remarquable cohérence du récit initial en prend un coup, et le spectateur doit se contenter des miettes de ce qui aurait pu être un grand film. DG