L'Enfer

Mercredi 7 décembre 2005

de Danis Tanovic (Fr, 1h35) avec Emmanuelle Béart, Marie Gillain, Karin Viard, Jacques Gamblin, Carole Laure...

La rumeur enflait avant la projection : L'Enfer, nouveau film de Danis Tanovic après son très bon No man's land, adapté d'un scénario non tourné de Kieslowski, était un ratage implacable. Après vision, on voit bien ce qu'on lui reproche, mais on ne peut s'empêcher de défendre la démarche d'un cinéaste qui se pose plus en réalisateur qu'en metteur en scène. La modestie de l'artisan doué se ressent dans tous les plans de L'Enfer, et c'est sa force : rien, dans ces trois histoires de couple bien françaises (la vieille fille timide attirée par un bel inconnu, l'étudiante amoureuse de son prof, la femme trompée), ne devrait être passionnant. On se demande d'ailleurs ce que ce vieux catho puritain de Kieslowski en aurait tiré... Tanovic choisit d'en faire une sorte d'opéra avec un motif décoratif (la spirale), des tableaux (campagne tranquille ici, ville étouffante et grise là, et la froideur des hôtels et des studios photos au milieu), quelques refrains (les visites à la mère paralytique, les flashbacks traumatiques) et un chœur formidable : Karin Viard fait ce qu'on attend d'elle, mais Marie Gillain et Emmanuelle Béart osent ici des prestations à la hauteur de leur talent. La perfection des cadres, de la lumière, du montage, de la musique et de l'ensemble du casting (de Gamblin à Rochefort) fait le reste. On a dit qu'on s'en foutait un peu, de ces histoires. Mais quand elles se bouclent en un dénouement inattendu et que les larmes montent inéluctablement aux yeux, on se dit que cet Enfer-là n'était pas si anodin que cela...CC