Un fil à la patte
de Michel Deville (Fr, 1h20) avec Charles Berling, Emmanuelle Béart, Tom Novembre, Patrick Timsit...
Un fil à la patte, c'est la collusion entre deux phénomènes : la vague hystérique d'adaptations de Georges Feydeau et la fatigue qui a gagné le cinéma de Michel Deville. Feydeau d'abord... Devenu une référence culturello-scolaire, le maître du vaudeville voit tout le théâtre français lui passer sur le corps, louant son génie comique et vantant à tout crin sa modernité (en fait, son talent inaltérable de scénariste et de dialoguiste). Michel Deville, revenu de l'enfer nanaresque des Toutes peines confondues et autres Divine poursuite par la grâce de sa sobre adaptation de La Maladie de Sachs, trouve en Feydeau la matière idéale pour repartir 20 ans en arrière et greffer paresseusement ses tics les plus vains de mise en scène : zooms, inserts, clins d'œil distanciés, ping-pongs verbaux, caméra ivre sur son axe et casting "deluxe" avec le meilleur (on y revient) et le pire des comédiens français (Stanislas "tirez pas sur l'ambulance" Merhar et Sara Forrestier, qu'on dirait encore en train de répéter Marivaux dans L'Esquive !). Un fil à la patte s'échoue dans un entre-deux temporel : le XIXe indémodable de Feydeau contre la musique vieillotte de Deville. Comme l'auteur n'est plus là pour se faire entendre, c'est le cinéaste qui l'emporte haut la main, plombant le film d'un côté touche-pipi que même le théâtre de boulevard ne s'autorise plus et multipliant les private jokes pour public lettré dont on peine à cerner l'intérêt (les titres des pièces de Feydeau placés dans le dialogue, ça sert à quoi ?). Voilà , voilà ... Ah ! on avait promis de le dire : dans les rôles principaux, Charles Berling est formidable et Emmanuelle Béart démontre une fois de plus qu'elle est une magnifique actrice comique, mieux, qu'elle pourrait bien être notre Marylin Monroe. CC