Hair High

Mercredi 27 avril 2005

Bill Plympton, sale gosse turbulent, en remontre toujours plus violemment à ses pairs. S'il se révèle narrativement plus exigeant et moins chaotique dans ses épanchements visuels, son dernier né est aussi son plus abouti. François Cau

Il y a cette irrépressible aura branchouille autour du bonhomme : Plympton, c'est le mec qui a envoyé bouler Disney, qui élabore ses films tout seul, le démiurge complètement barré et sevré à la marijuana. Bref, une icône. Ses courts et longs métrages ont une touche identifiable entre mille, un look crayonné prêt à exploser d'un énième délire esthétique imprévisible. Des gags à base de déformations et explosions corporelles, de coïts tous azimuts (parfois avec des animaux), de créatures informes foutant le boxon dans un univers déjà pas super stable. On retrouve bien évidemment cela dans Hair High, mais également une recherche et une donnée émotionnelle qu'on soupçonnait dans ses opus précédents, sans trop oser la ramener (tant il semble déplacé d'écraser sa petite larme devant la love story pluri-zoophile des Mutants de l'Espace). Pour la première fois, Plympton donne vie à des personnages tangibles, et non à de simples catalyseurs de loufoqueries visuelles. Nouveau venu au lycée d'Echo Lake, Spud va devenir l'esclave de Cherri, pom-pom girl sortant avec le capitaine de l'équipe de foot. Mais voilà : la dominatrice et l'humilié vont s'éprendre l'un de l'autre, s'apprêtent à aller ensemble au bal de fin d'année quand soudain...Cherri au bal du diableCroisement réussi entre Grease, La Fureur de Vivre et un épisode des Contes de la Crypte, l'histoire de Hair High permet bien évidemment au créateur fou d'épancher sa soif de n'importe quoi bigarré. Le film est toujours déconseillé aux moins de douze ans, mais ses débordements sont cependant plus diffus. Jamais Plympton n'avait autant pris de soin à planter son décor et ses personnages, à élaborer une atmosphère déphasée en empruntant à tous les codes du genre (pour mieux les exploser par la suite, bien entendu). L'hystérie trash pointe moins souvent le bout de son nez, pour un impact cela dit équivalent. Plympton se serait-il embourgeoisé, cédant au glamour véhiculé pour son casting vocal trois étoiles (Dermot Mulroney, Matt Groening, Keith et David Carradine...) ? Libre aux esprits chagrins de le penser, qu'ils laissent les aficionados savourer ce nouveau tour de force animé, cette exploration foutraque des grandes figures de l'inconscient adolescent passées à la machine à reluire hollywoodienne. À ce titre, il se dégage de Hair High un respect pour le matériau traité autrement plus parlant qu'une bonne vingtaine de teen movies récents. En ramenant sa narration vers une linéarité faisant la part belle à son (apparente) anarchie esthétique, Bill Plympton ose enfin affronter le premier degré en face et signe son chef-d'œuvre, où même la country rocailleuse de Hank Bones (compagnon musical de longue date) n'a jamais semblé aussi appropriée. Vivement le prochain. Hair Highde Bill Plympton (EU, 1h17) animation