de Marc Forster (EU, 1h41) avec Johnny Depp, Kate Winslet, Dustin Hofffman...
Voilà déjà longtemps qu'il a quitté l'enfance, mais son enfance ne l'a pas quitté. James M. Barrie, le créateur de Peter Pan, ne s'est jamais remis de devoir grandir, et c'est en observant les enfants d'une jeune veuve qu'il croise à Londres au début du XXe siècle, qu'il recomposera sur les planches ce "Neverland", pays de nulle part où l'imaginaire peut retrouver la grâce et l'inédit des plus petits. On voit bien ce que les producteurs de Miramax ont pu trouver de sucrerie familiale et de réflexion neuneu sur la création (l'artiste, c'est celui qui a su garder son cœur d'enfant) dans cette adaptation polie et policée d'une pièce de théâtre à succès. C'est d'ailleurs assez étrange que Marc Forster, auteur de l'autrement plus hardcore À l'ombre de la haine, tragédie sur le racisme qui valut l'Oscar à Halle Berry, ait tourné ce mélodrame gentillet vite fait bien fait avant de retourner au thriller (Stay, avec Ewan McGregor et Naomi Watts, devrait sortir d'ici quelques mois). Mais le véritable intérêt ici, c'est de voir comment Johnny Depp, beau comme un adonis trentenaire, est capable de faire coexister l'enfant et l'adulte, le masculin et le féminin (de ce point de vue, James Barrie était plutôt du genre pas très bien fixé), le fou gentil qui n'a jamais grandi et le dramaturge en pleine maturité qui compose des contes codés à partir de son existence. À lui seul (Kate Winslet, pourtant épatante, n'a pas grand-chose à jouer), il apporte l'aura et le mystère que ce film soigneusement édulcoré (les relations de Barrie étaient autrement plus barrées dans la réalité et les enfants, les malheureux, ont tous crevés !), aura tout fait pour éviter. Luc Hernandez