Quand l'embryon part braconner

Mercredi 5 décembre 2007

de Kôji Wakamatsu (1966, Japon, 1h12) avec Hatsuo Yamatani, Miharu Shima...

Un cadre sadique et misogyne séquestre dans son appartement une jeune vendeuse, et, entre deux visions oniriques, évacue le poids du traumatisme lié à sa défunte épouse. Oui, ce postulat de départ, scandé de scènes de "dressage" odieuses, est violent, même si le passage du temps amoindrit considérablement l'impact visuel de ses écarts. Kôji Wakamatsu opte pour une représentation frontale de la barbarie de son irrécupérable personnage principal, insiste lourdement sur ses névroses pour mieux cerner son ignoble hypocrisie (via notamment le procédé daté, mais ici précurseur, de la surimpression d'images). Le regard du spectateur est sciemment brutalisé, son côté voyeur démultiplié. L'inconfort est manifeste, et le retournement de situation du dernier acte ne viendra nullement offrir une sécurisante porte de sortie. Élément fondamental, la métaphore politique du propos, développée entre les lignes avec plus ou moins de finesse, donne à l'œuvre toute sa sève, inscrit le film dans l'histoire du cinéma nippon par son bouleversement nihiliste des valeurs établies. Et c'est justement à l'aune de cet aspect que Quand l'embryon part braconner devrait être jugé, et non sur son enchaînement de "scènes de grande violence, de torture et de sadisme", ou "l'image des relations entre les êtres et entre les sexes fondée sur l'enfermement, l'humiliation et la domination de la femme" (ce dernier point est d'ailleurs mensonger) stigmatisés par la Commission de Classification des ÂŒuvres Cinématographiques, puis par la Ministre de la Culture, qui a validé l'interdiction du film aux moins de 18 ans pour sa nouvelle sortie salles. Nous avons hélas là une preuve éclatante que le film a été jugé sur sa seule réputation, son synopsis et sa bande-annonce à la limite, et surtout que ses censeurs n'ont même pas pris la peine de le regarder en entier. Étonnant, non ? FC