Émilie Le Roux, metteuse en scène grenobloise qui nous avait plutôt habitués à monter du jeune public, revient cette fois-ci avec sa version d'Antigone. Sa version, forcément : car s'attaquer aujourd'hui à ce genre de tragédies plus que référencées suppose de prendre parti.
Le sien est donc celui des croisements : au texte de Sophocle répond principalement celui de l'auteur contemporain belge Henry Bauchau. Ces matériaux en poche, elle commence alors sa pièce juste après le voyage qu'Antigone vient d'effectuer avec Œdipe, ancien roi de Thèbes. Un voyage dont on ne saura rien, la metteuse en scène choisissant de ne pas assommer le spectateur avec moult références pour mieux l'emmener dans l'histoire : celle d'une femme revenue dans une ville changée, maintenant ravagée par la guerre que se livre ses deux frères Étéocle et Polynice, sous l'œil de leur oncle Créon.
Si le rendu est d'une grande tenue, fruit d'une réelle maîtrise du langage théâtral, on reste cependant plus que dubitatif quant au fondement même de cette proposition. Plutôt que d'utiliser la figure chargée d'Antigone comme pâte à modeler théâtrale source d'interprétations et de fantasmes, Émilie Le Roux décide de la noyer dans un simili soap opéra familial sans véritables enjeux palpables. Si ce n'est à la fin du spectacle, lorsque les quelques phrases du poète grec Yannis Ritsos retentissent, mettant enfin en évidence pourquoi la figure d'Antigone fascine toujours. Un peu trop tard.
ANTIGONE [RETOUR À THÈBES]
Du 22 au 26 février au Théâtre de Création. Le 17 mars à la Ponatière (Echirolles). Le 19 mars au Pot au Noir (Rivoiranche)