"Boogy Show" de Juliez Priez, des lettres de caractère

Graphisme / Avec "Boogy Show", le typo-calligraphiste Julien Priez investit l’espace du Centre du graphisme avec un projet d’ampleur qui met en avant la dimension exploratoire de son approche. Un travail graphique qui redonne aux lettres leur noblesse.

Insatiable expérimentateur, Julien Priez s’éclate depuis une bonne dizaine d’années à déconstruire le dessin des lettres latines pour mieux en redéfinir les contours. Un goût pour l’exploration graphique qu’il a toujours eu cœur à dévoiler et auquel l’exposition du Centre du graphisme rend hommage de manière remarquable.

Déployé en deux temps, le parcours propose une première salle consacrée aux recherches de lettrage et aux explorations calligraphiques, tandis que la seconde se concentre sur le passionnant travail de création de caractères dont les néophytes que nous sommes n’ont souvent pas la moindre idée. Pour chacune de ces deux salles, le dispositif scénographique est le même : Julien Priez investit les murs du centre grâce au dessin de lettres gigantesques (qui forment son pseudo : Boogy Paper) et présente à hauteur de regard, sur des petits formats, ses éditions, des expérimentations (l’amusant tracé de lettres à l’échelle d’une ville grâce à une application de running), ou ses recherches préalables à certaines réalisations (une intervention in situ dans le siège de Nike à Portland, le titrage de l'EP La vita nuova de Christine and the Queens...).

Avançant progressivement dans l’exposition, le spectateur assiste ainsi à la maturation des projets et découvre comment l’exploration libre et spontanée du dessin de la lettre nourrit la création de caractères aussi singuliers que parfaitement équilibrés. Tout ici est le fruit d’un travail passionné et passionnant, rien n’arrive par magie. Le hasard et les accidents, par contre, ont pleinement leur place et participent d’une création vibrante, inventive et pleine de vie.

Hip-hop et typo

Tout comme le dessin des caractères typographiques l’exposition est faite de tensions. Tensions entre la maîtrise et l’accident donc mais aussi entre le noir et le blanc, le petit et le grand, le plein et le vide, le gestuel et le numérique… Des tensions que l’on perçoit également sur le visage de Julien Priez, dans un film qui documente avec justesse le travail nécessaire à l’élaboration des gigantesques lettrages peints à l’aide d’un pinceau modulable à trois brosses bricolé par l’artiste. Appliqué, concentré, parfois grimaçant, Julien apparaît tour à tour épuisé, satisfait ou traversé par le doute ; des états physiques et émotionnels qui alimentent une création qui n’est pas le fruit d’une intelligence artificielle, mais bien celle d’un être humain habitué à travailler en collectif. Car c’est aussi une des particularités de l’approche de Julien Priez : il collabore régulièrement avec d’autres graphistes-typographes avec lesquels il édite des fanzines, conçoit des typographies, organise des sessions de travail...

Pour cette exposition c’est d’ailleurs avec tout un crew qu’il s’est déplacé : un commissaire d’exposition, un vidéaste, des graphistes... Rien d’étonnant de la part de cet ancien graffeur qui affirme un goût pour l’émulation collective dont l’énergie est propre à la culture hip-hop. Une énergie qu’il est par ailleurs amusant de transposer du côté de la création de caractère, puisque, comme le dit Julien « en calligraphie, chaque lettre réagit au dessin de la précédente ». Pas d’individualisme dans la typo !

Julien Priez Boogy Show jusqu'au 16 juillet au Centre du graphisme - Le Tracé (Échirolles), entrée libre

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