Comme s'il fallait toujours qu'il porte un masque ou brouille les pistes José Gonzalez le Suédois a toujours fait davantage parler de lui presque par procuration. En solo, c'est avec Heartbeats la reprise d'un duo électro suédois qu'il rencontre la notoriété mondiale, le tube illustrant alors une publicité télévisée, au point de masquer en partie la beauté de son premier album "Veneer". Sur le deuxième, malgré des compositions à pleurer, c'est encore avec une reprise, de Massive Attack cette fois, qu'il couche l'auditeur. Puis, en live, avec une autre du "Love Will Tear Us Apart" de Joy Division, sèche comme une trique. Que dire alors de Junip, son groupe, fondé en 1998, mais qui ne sortit pas le moindre disque avant 2005. De Junip, on ne connaissait guère que José Gonzalez, une lointaine réputation, et, pour l'avoir découvert sur la splendide compilation Cowboys in Scandinavia, une version très American Gothic du "Ghost of Tom Joad" de Bruce Springsteen. Mais en 2010, avec, enfin, un premier album, "Fields", Gonzalez et Junip ne se contentent plus de chasser les fantômes. Et quelque part, les fans du José solo ne seront pas dépaysés. Simplement là où en solo, il travaille dans le dénuement de sa guitare et de sa voix hypnotique, avec Junip, il nourrit la bête. De choucroute en plus, tant il semble regarder vers le krautrock. Ce qui donne inévitablement au propos une épaisseur certaine : les arpèges habituels se muant en une sorte de groove sombre, de krautfolk aux ascendances chamaniques où le feu intérieur brise sans mal la glace que Gonzalez avait parfois un peu de mal à briser seul. SD
