Université Lyon 2 : l'historien Julien Théry suspendu après l'exhumation d'une caricature jugée antisémite

Publié Vendredi 5 décembre 2025

Suspension / Déjà au cœur d'une tempête médiatique pour avoir diffusé une liste de personnalités à « boycotter », l'enseignant-chercheur en histoire médiévale fait face à une nouvelle accusation. La révélation d'une publication Facebook datant de janvier 2024, reprenant des tropes antisémites, a conduit la présidence de l'université à prononcer sa suspension à titre conservatoire ce mercredi.

Photo : Université Lyon 2 © NP/LePetitBulletin

C'est l'épilogue provisoire d'une semaine de tensions exacerbées à l'université Lumière Lyon 2 située à Bron. Julien Théry, professeur d'histoire médiévale reconnu pour ses travaux sur les hérésies et la monarchie capétienne, a été suspendu de ses fonctions à titre conservatoire. Si l'universitaire était déjà sous le feu des critiques, c'est l'exhumation par l'UNI, syndicat étudiant de droite, d'une publication Facebook de janvier 2024 qui a précipité la décision.

Le visuel incriminé représente un vol de portefeuille commis par un homme portant une kippa décorée de symboles israéliens, au détriment d'une femme arborant un drapeau palestinien. Pour l'UNI l'image confond critique politique et recours à l'imagerie antisémite.

 Une accumulation de signalements

La suspension intervient dans un climat déjà délétère à l'université depuis plusieurs semaines de blocages liés au conflit israélo-palestinien, d'affrontements entre collectifs étudiants, d'interventions policières, de plaintes d'enseignants visant des menaces en ligne, et de controverses autour de réunions en non mixité choisie. La présidence a choisi d'appliquer son principe de signalement.

Face à la gravité des faits supposés, l'université Lyon 2 a activé l'article 40 du Code de procédure pénale, obligeant tout fonctionnaire à signaler un crime ou délit au procureur de la République. L'université estime que la publication incriminée pourrait relever d'un délit, ce qui a conduit le parquet de Lyon à ouvrir une enquête. La suspension conservatoire, mesure de précaution et non sanction, écarte temporairement l'enseignant en attendant l'examen disciplinaire.

Cette suspension survient quelques jours à peine après une première controverse initiée par le même enseignant. Julien Théry avait relayé une liste de « génocidaires à boycotter », compilant en réalité les noms de signataires d'une tribune parue dans Le Point appelant à ne pas reconnaître l'État de Palestine sans conditions. La méthode a été perçue par l'exécutif régional et la mairie de Lyon comme une incitation à la haine et au harcèlement envers les personnes nommées dans la liste dressée par Julien Théry. Sud Éducation et la CGT Lyon 2 l'avaient alors publiquement soutenu, estimant qu'il s'agissait d'une réaction politique à une prise de position publique, dénonçant un « déferlement de haine » alimenté, selon eux, par la droite et l'extrême droite. Ce premier appui syndical s'est toutefois fissuré après la révélation de la caricature publiée sur Facebook par l'enseignant en 2024. Dans un second communiqué, la CGT Lyon 2 et Sud Éducation se sont « désolidarisés » de cette publication, qu'ils qualifient d'« abjecte », tout en réaffirmant leur engagement contre l'antisémitisme et en mettant en garde contre toute instrumentalisation de l'affaire pour discréditer la communauté universitaire.

Défense politique contre accusation d'antisémitisme

L'enseignant plaide la maladresse. Dans un message d'excuse, il dit reconnaître que la publication était « ambiguë » et qu'elle pouvait être « mal interprétée », tout en affirmant qu'elle visait la politique du gouvernement israélien et non la communauté juive. Il dénonce aussi une offensive politique menée, selon lui, par l'UNI et certains élus locaux.

Dans l'attente d'une décision disciplinaire, Julien Théry reste écarté des cours et de toute activité pédagogique.