Rentrée des auteurs Auvergne-Rhône-Alpes : trois livres à lire

Rentrée littéraire / Le 11 septembre au Musée des Confluences, Auvergne-Rhône-Alpes Livre et Lecture présente, comme à chaque rentrée littéraire, le panorama complet des romans des principaux auteurs régionaux – à ne pas réduire à cette simple dimension. Outre "La Source des fantômes" de Yamina Benahmed Daho, d'autres ouvrages sont à ne manquer sous aucun prétexte, dont ces trois-là tous signés d'auteurs lyonnais.

Pierric Bailly – La Foudre (P.O.L.)

Les livres de Pierric Bailly, c'est presque immanquablement la promesse de l'atmosphère brumeuse du Haut-Jura, une écriture rocailleuse et des destins toujours un peu empêchés ou en proie au basculement. Le dernier roman en date, La Foudre, ne déroge pas à la règle – si ce n'est que la nature jurassienne y est ici remplacé par les Alpes – qui met en scène Julien (que tout le monde appelle John, comme son grand-père), un jeune berger en passe de tout quitter pour suivre sa compagne à La Réunion. Jusqu'à ce qu'il apprenne qu'un ancien camarade de lycée – qu'il admirait – est en détention provisoire pour homicide. Et c'est bien le destin de Julien qui bascule lorsque, cherchant à comprendre et à aider Alexandre, il se rapproche de sa compagne Nadia, qu'il a aussi bien connue plus jeune. De tous temps attiré par la foudre, Julien/John pourrait en être frappé mais pas comme il le croyait. Comme souvent chez Pierric Bailly, des atmosphères rugueuses et des histoires un peu âpres se dégage une grande douceur et beaucoup d'humanité. Qui ne font pas l'économie d'un vrai regard sur le monde contemporain et, ici, sur l'écologie radicale. Et surtout qui explorent des vies, non pas minuscules mais moyennes, les vies d'un peu tout le monde sans vraiment de reliefs mais pas sans aspérités, qui se demandent où est passée cette jeunesse laissée derrière – un trait qu'il a en commun avec le genre d'approche qu'aurait un Nicolas Mathieu. Et qui comme les plus grands destins finissent par prendre la foudre à un moment ou un autre de leur vie. Une constante revient aussi dans ce roman, comme dans certains des précédents, celle du personnage qui, d'une manière ou d'une autre, s'invite dans la vie des autres, s'insinue, se mêle, prend la place. On trouve sans doute là la matérialisation du fantasme le plus pur de l'écrivain – vivre la vie des autres – ainsi qu'une déformation de sa pratique.

Rencontre à la Librairie Rive Gauche le jeudi 21 septembre

 

Robin Josserand – Prélude à son absence (Mercure de France)

Il y a des premiers romans attendus – parce que la presse en a fait ses chouchous a priori sur la foi de mécanismes toujours un peu similaires même si opaques – et ceux qui prennent le milieu littéraire par surprise. Et c'est toujours assez touchant de voir naître un écrivain comme un diable sort de sa boîte sans que quiconque n'ait crié gare. C'est le cas de Robin Josserand avec Prélude à son absence. Surprise – une autre – il s'agit d'une autofiction dans le plus pur style des classiques modernes qui ont fait la gloire de ce genre – aujourd'hui un peu tombé en désuétude, en tout cas dans sa forme la plus pure. On pourrait même, en citant les modèles – de Genet à Dustan en passant par Guibert et peut-être Burroughs –, étendre la classification à l'autofiction de l'homosexualité qui charrie non pas seulement une thématique mais une esthétique propre à laquelle Robin Josserand s'attache brillamment. En clair : il a du style, beaucoup de style. C'est donc l'histoire d'un bibliothécaire, Robin, de son propre aveu assez médiocre, tombé en amour pour un jeune homme à la rue, une de ses beautés jaillies comme une apparition, des impossibilités et des élans contraires, de l'ennui surtout que cet amour « invécu » entraîne. De l'aveu même de l'auteur, qui vit à Lyon, Prélude à son absence est aussi un "roman lyonnais" puisque la ville en est le décor, pour ne pas dire le théâtre et même "le troisième personnage". Dans une interview donnée à un site web littéraire, l'auteur confiait qu'à son avis, pour écrire, « il faut trembler un peu ». Cela donne parfois des romans vibrants.

Rencontre à la librairie du Tramway le mardi 19 septembre.

 

Loïc Merle – Provinces de la Nuit

Ismaël Tir a une obsession – en plus de celle de vouloir à tout prix devenir propriétaire, mal contemporain : celle de son premier amour et de la manière dont il a pris fin. Un amour qui court tout au long de ce livre qui lui s'étend sur deux décennies de la vie d'Ismaël, calé entre le 11-Septembre et les attentats de novembre 2015 – décrits ici avec minutie. Car Provinces de la nuit est comme un roman d'apprentissage amoureux et politique à la fois, entre drames collectifs et tragédies intimes, tout aussi dévastateurs les uns que les autres dans leur violence concentrée. Pour son quatrième roman (il avait notamment été révélé par L'Esprit de l'ivresse, il y a dix ans), le Lyonnais Loïc Merle fait toujours œuvre d'un style foisonnant et d'une grande fluidité et impressionne par sa manière de mêler l'universel au très particulier.

Et aussi :

Yves Bichet – Le Premier Combat (Le Pommier)

Marcia Burnier – Hors d'atteinte (Cambourakis)

Aline Caudet – Déchirer le grand manteau noir (Viviane Hamy)

Carole Fives – Le Jour et l'heure (Jean-Claude Lattès)

Christophe Guillemain – La Morsure des roses (Mnémos)

Jérôme Millon – La Faute de Titivillus : conte hérétique (La Fosse aux Ourse)

Wilfried N'Sondé – La Reine aux yeux de lune (Robert Laffont)

 

Au Musée des Confluences lundi 11 septembre à 9h30

 

 

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