Mars Express

Science-fiction / Et si les Intelligences Artificielles étaient les prolétaires de demain ? Entre SF et polar, ce film d’animation signé Jérémie Périn prône un stimulant rétro futurisme esthétique.

On le sait depuis A.I. et Her : spéculer sur l’avenir des Intelligences Artificielles au cinéma revient à s’interroger sur leur autonomie émotionnelle, signe final de leur capacité à dépasser l’humain. Dans ces deux films, comme dans cet excellent Mars Express, l’idée n’est pas tant celle d’une coexistence pacifique ou d’un affrontement belliqueux, tous deux envisagés puis dépassés, que d’une sécession où tout le monde retournerait à sa solitude et à ses névroses. Il faut dire que Jérémie Périn, remarqué au préalable grâce à sa série animée Lastman, ne se propulse en l’an 2200 sur Mars et sa capitale Noctis, transformée en simili-Los Angeles par un dôme artificiel imitant un ciel bleu azur le jour et constellé d’étoiles la nuit, que pour en tirer un poste d’observation sur la réalité contemporaine. 

Robots après tout

Il fait mieux encore : de son animation 2D volontiers rétro jusqu’à son intrigue recopiant avec habilité les figures imposées du roman et du film noirs, il choisit de tirer des perspectives entre passé, présent et futur en pointant ce qui, immuablement, résiste au changement : la manière dont l’homme trouve toujours un moyen d’exploiter son prochain. Le complexe complot que tente de déjouer une détective badass et alcoolique (avec la voix de Léa Drucker, sur tous les fronts cette année après Dupieux et Breillat) révèle surtout l’engrenage sécuritaire qui permet de mâter les revendications sociales pour préserver l’ordre établi. Le discours serait attendu s’il n’était illustré par de puissantes visions graphiques et incarné par quelques personnages extraordinaires, le tout enrobé d’un humour cynique à la Raymond Chandler et d’un envoi métaphysique qui touche au cœur par la simplicité de son expression.

Mars Express
De Jérémie Périn (Fr, 1h25) animation avec les voix de Léa Drucker, Mathieu Amalric, Daniel Njo Lobé…
Sortie le 22 novembre.

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