L'intérêt de se transformer en Scop
Se transformer en Scop permet à une entreprise de concilier performance économique et gouvernance démocratique. Ce modèle offre une réponse concrète aux enjeux de pérennité, d'implication des salariés et de transmission d'entreprise, en mettant l'humain au cœur du projet collectif.
Qu'est-ce qu'une Scop ?
Une Scop, société coopérative de production ou société coopérative et participative, est une société commerciale à capital variable qui prend la forme juridique d'une SARL, d'une SAS ou d'une SA. Les salariés en sont les associés majoritaires. Pour être reconnue en tant que Scop, la société doit être agréée par le ministère du Travail.
En 2024, on comptait plus de 4 000 Scop en France. Ce type de société, bien souvent méconnu, permet au dirigeant de céder son entreprise à ses salariés, c'est-à-dire à ceux qui la connaissent le mieux.
Tout en laissant la majorité du capital à ses salariés, il est possible pour le dirigeant de conserver une partie de ses titres et d'être nommé gérant ou président de la Scop afin d'accompagner les salariés dans la reprise de l'entité.
Les avantages fiscaux et sociaux et les limites
Le premier avantage porte sur l'actionnariat de la Scop. En effet, tous les salariés ont vocation à devenir associés. Néanmoins, ce sont les statuts de la Scop qui régissent les conditions pour devenir associé (par exemple, une condition d'ancienneté). Chaque associé dispose alors d'une voix à l'assemblée générale. Enfin, les salariés doivent détenir au moins 51 % du capital social et 65 % des droits de vote.
Le deuxième avantage porte sur le soutien financier extérieur. Lors de la reprise d'une entreprise par ses salariés, il est possible de bénéficier du soutien d'investisseurs extérieurs, c'est ce qu'on appelle une Scop d'amorçage. La société a alors sept ans pour que les salariés deviennent majoritaires à son capital social. Après cette période, les associés extérieurs doivent céder leurs titres ou en obtenir le remboursement pour permettre aux associés salariés d'atteindre la majorité.
Le troisième avantage réside dans la fiscalité. En effet, les Scop bénéficient de plusieurs avantages tels que :
- l'exonération de la cotisation foncière des entreprises ;
- les sommes versées à la réserve spéciale de participation (part versée à tous les salariés) déductibles de l'assiette de l'impôt sur les sociétés ;
- la provision pour investissement (PPI) constituée, lorsque la société s'engage à investir en matériel sous quatre ans, déductible de l'assiette de l'impôt sur les sociétés. Son suivi annuel est donc à assurer.
Abordons la question de la répartition des résultats bénéficiaires. Cette dernière est prévue par la loi et précisée par les statuts de la Scop :
- une part est affectée à tous les salariés, associés ou non, sous forme de participation ;
- une part est affectée aux réserves de l'entreprise (légale et statutaires) ;
- et une part est affectée à tous les associés sous forme de dividende.
La répartition des résultats est un avantage pour tous les salariés, car ils bénéficient d'une part sous forme de participation et d'une part sous forme de dividende s'ils sont également associés.
Pour les associés non salariés, en revanche, cette répartition vient limiter leur retour sur investissement, puisque le dividende versé ne peut pas être supérieur à la part affectée sous forme de participation et celle affectée aux réserves. De plus, dans un souci de sécurisation de la continuité d'exploitation, les réserves ne sont pas distribuables aux associés.
Enfin, pour s'assurer du respect de la conformité de l'organisation et du fonctionnement de la Scop, la société doit procéder à une révision coopérative tous les cinq ans, menée par un réviseur agréé par le ministère du Travail ou tous les ans si elle n'a pas de commissaire aux comptes.
Les étapes de transformation et transmission
Tout d'abord, il est important de connaître l'objectif poursuivi d'une telle transformation.
Nous l'avons vu, il peut s'agir pour le dirigeant en place de transmettre sa société à ses salariés et d'en assurer la pérennité1. D'autres fois, le but premier réside dans la sauvegarde de l'emploi et la poursuite d'une histoire, ce qui a été le cas avec la reprise de Duralex en Scop.
La transformation d'une entreprise2 en Scop se déroule en plusieurs étapes clés :
1. Évaluation de la volonté collective : impliquer tous les salariés dans le projet de transformation et s'assurer qu'il y a un consensus. La réussite d'une Scop repose sur l'engagement et la motivation des salariés. Il est essentiel de favoriser la participation et d'encourager les idées de chacun.
2. Formation et sensibilisation : informer les salariés sur le fonctionnement d'une Scop et ses spécificités par rapport à d'autres formes juridiques. Cela passe notamment par la formation continue aux principes coopératifs, au rôle en tant que sociétaires. Au-delà, instaurer une culture d'entreprise basée sur la coopération, la solidarité et le partage des responsabilités va ancrer de manière pérenne les principes coopératifs au sein du fonctionnement de la structure.
3. Étude de faisabilité : analyser la viabilité économique, juridique et sociale de la transformation. Le coût juridique d'une telle opération doit être correctement évalué et clair. Également, les équilibres financiers ainsi que la structuration juridique et sociale du projet doivent être appréhendés dans leur globalité afin d'en assurer la transparence (volonté souvent recherchée et mise en avant dans les structures de sociétés coopératives, ce qui permet d'instaurer la confiance), et la fiabilité. Un modèle économique compris par tous et auquel tout le monde adhère est crucial.
4. Rédaction des statuts : élaborer des statuts conformes à la législation des Scop, précisant les règles de gouvernance et de répartition des bénéfices.
5. Assemblée générale constitutive : organiser une réunion pour valider le projet, adopter les statuts et élire les premiers dirigeants.
6. Formalités administratives3 : déposer les statuts au greffe du tribunal de commerce et accomplir les démarches nécessaires pour l'immatriculation en tant que Scop telles que, pour rappel, la demande d'agrément via les services des Directions régionales de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités (Dreets) préalablement à l'immatriculation.
Il est également important de planifier soigneusement chaque étape et d'allouer le temps nécessaire (de quelques semaines à plusieurs mois) pour garantir une transition réussie vers le statut de Scop.
Moyens indispensables à mettre en œuvre
- Accompagnement externe : se rapprocher d'organismes spécialisés ou de réseaux de Scop pour bénéficier de conseils et d'un soutien durant la transition. S'entourer de professionnels permet de profiter des conseils appropriés / pertinents (juridique, social, économique, financier...).
- Modèle économique clair : définir un modèle économique solide et durable est crucial. Cela inclut une bonne gestion financière, des prévisions réalistes et une stratégie commerciale adaptée. L'appui d'un expert-comptable serait alors opportun.
- Formation et développement des compétences : investir dans la formation professionnelle des salariés pour renforcer leurs compétences et leur permettre de participer efficacement à la gestion de l'entreprise.
La transformation en Scop représente ainsi une opportunité stratégique pour renforcer la cohésion interne, garantir l'indépendance de la structure et partager équitablement la valeur créée. Comme tout projet, le temps de la réflexion et la structuration de celui-ci permettent d'accroître les chances de réussite.