De Cédric Anger (Fr, 1h51) avec Guillaume Canet, Ana Girardot...
Comme Vie sauvage d'un autre Cédric (Kahn), La Prochaine fois je viserai le cœur s'inspire d'un fait divers célèbre : les agissements à la fin des années 70 d'un tueur en série dans l'Oise qui s'est révélé être... un des gendarmes enquêtant sur les crimes. Et comme Vie sauvage, le film de Cédric Anger peine à prendre ses distances avec la réalité, malgré ses tentatives de stylisation et le désir de ne jamais quitter le point de vue du meurtrier – un Guillaume Canet qui surjoue la fièvre et le dolorisme.
Le film est d'abord plombé par son écriture, et en particulier ses dialogues, qui reproduisent une fois encore les clichés des fictions françaises – des gendarmes qui parlent comme des gendarmes, des ados comme des ados... Surtout, Anger tourne autour de la névrose de son personnage sans jamais oser l'affronter à l'écran : la peur des femmes et la haine de soi qui s'empare du gendarme lorsqu'il commence à les désirer. Le personnage d'Ana Girardot, amoureuse aveuglée, lui ouvrait pourtant la voie. Mais la seule scène de sexe du film se résume à quelques sous-entendus le lendemain matin. Le trouble que le cinéaste cherche à créer dans sa mise en scène est comme annihilé par ce puritanisme qui n'est peut-être qu'un compromis de production. D'où question : peut-on faire des films tout public autour de serial killers sexuellement dérangés ? Visiblement, non, mais certains s'entêtent à le penser.
Christophe Chabert