Alors qu'il y a tout juste cinq ans, la mairie de Pont-de-Claix décidait de changer totalement la ligne de son théâtre en l'axant sur la création très contemporaine, nouveau changement avec la reprise en main de l'équipement par cette même mairie. En cause, la programmation de la directrice jugée trop élitiste. Presque deux mois après la publication de l'information, le maire Christophe Ferrari s'exprime enfin sur le sujet. Propos recueillis par Aurélien Martinez
Changement de position à la mairie de Pont-de-Claix au sujet de l'Amphithéâtre. Alors que Christophe Ferrari souhaitait visiblement rester loin, très loin, de la polémique entourant l'Amphithéâtre, demandant à son adjointe à la culture de justifier son choix de remercier la directrice de la structure culturelle, il fait machine arrière, sans doute au vu de la tournure que prennent les événements – beaucoup s'émeuvent de sa décision, parfois violemment comme l'ancien directeur de l'Amphithéâtre Michel Belletante dans une lettre ouverte au vitriol.
Une prise de parole tardive de l'édile (plus d'un mois après les premiers papiers dans la presse) expliquée aujourd'hui par une volonté de ne pas interférer à l'époque sur les élections départementales qui se sont déroulées fin mars.
« Rendre la culture accessible à tous »
Jeudi 9 avril, une poignée de journalistes a donc été conviée en mairie pour une conférence de presse, au sens propre du terme: longues notes à l'appui, Christophe Ferrari a parlé pendant quarante-cinq minutes de culture à Pont-de-Claix, vantant son action depuis 2008. Sans Corinne Grillet à ses côtés, l'adjointe à la culture depuis 2014 (elle était retenue pour raisons professionnelles), mais avec Sam Toscano, en charge de la culture lors du précédent mandat (il est aujourd'hui premier adjoint). Morceaux choisis.
« La compétence culturelle est une compétence pleine et entière des communes aujourd'hui, qui l'exercent sur la base du projet des élus. Il n'est pas complètement anormal que des élus puissent s'intéresser à la portée d'un projet culturel. Il est même de la responsabilité des ces élus de se demander comment confirmer des pratiques culturelles mais aussi ouvrir d'autres champs. »
« Évidemment, la culture à Pont-de-Claix n'est pas en danger. Le budget de la culture est d'un million et demi d'euros par an, soit près de 136 euros par habitant. Un chiffre qui place notre commune comme la quatrième de l'agglo grenobloise, dont la moyenne est estimée aujourd'hui à 117 euros par habitant. »
« Est-ce la mort d'un théâtre que je vous annonce aujourd'hui ? Évidemment non. J'ai même été surpris et assez choqué que le résumé ait été ainsi fait. Ce n'est ni la mort d'un théâtre, ni la mort du spectacle vivant sur Pont-de-Claix. Il y aura une programmation derrière, désolé de peut-être vous apprendre un truc. »
« Notre volonté est de rendre la culture accessible à tous, de favoriser la création et les pratiques culturelles qui sont diversifiées ; tout cela dans le cadre de la vie quotidienne de nos concitoyens. Je ne peux pas me satisfaire d'une réalité où la population de Pont-de-Claix est peu tournée vers les politiques culturelles, que ça soit l'Amphithéâtre ou d'autres endroits. On ne pourra pas faire sans les habitants, qui doivent être des acteurs du théâtre. »
« On dit que ce qui se passe autour de l'Amphithéâtre serait parce que le maire n'aurait en tête qu'un seul et grand projet : celui des Moulins, du planétarium. Mais ce projet n'est pas là contre le projet de l'Amphithéâtre ou un autre. »
« La programmation sera assurée à la rentrée »
Est ensuite venu le temps des questions.
Sur la durée du mandat d'Emmanuelle Bibard, très court pour installer des actions qui demandent du temps : « Finalement, quelle serait la bonne statistique de durée des politiques publiques culturelles ? Vous le savez, vous ? »
Sur le bilan d'Emmanuelle Bibard à la tête de l'Amphithéâtre : « En 2010, nous avions voté une convention d'objectifs et de moyens avec l'association Amphipédia. On avait fait le choix d'une directrice qui n'avait jamais dirigé de salle : le pari a été clair. [...] Il y a des choses qui ont réussi avec Emmanuelle Bibard, notamment sur les liens avec les scolaires. Mais ce n'est pas choquant de dire que d'autres choses n'ont pas fonctionné, comme l'accès de nos concitoyens au lieu. Peut-être que les Pontois ont considéré que la programmation n'était pas pour eux. » Des chiffres ? « Si on enlève les scolaires, on était à 3% de Pontois dans la salle me semble-t-il. »
Sur le virage pris par le maire lui-même en 2010, en positionnant clairement l'Amphithéâtre sur les esthétiques contemporaines : était-ce, rétrospectivement, une mauvaise décision de sa part ? « Peut-être pour partie mais pas entièrement. Ce n'est pas tout blanc ou tout noir. Ce n'est pas parce qu'une programmation est pointue que, forcément, elle ne touchera pas les gens. »
Sur l'avenir de l'Amphithéâtre : « L'Amphithéâtre a connu de nombreux modes de gestion : délégation de service public, mode associatif. Aujourd'hui, la question est posée de sa gestion en régie directe. [...] La programmation sera assurée à la rentrée. Notre effort en matière culturelle sera toujours aussi fort. Ça pourra être à la fois avec du spectacle vivant, de la lecture publique, des arts plastiques, de l'art dans la ville... » Il assure qu'une réflexion est en cours.
Déclaration bonus : « Je suis sûr qu'avec cette belle expérience, Emmanuelle Bibard retrouvera très vite une direction de théâtre, peut-être même dans notre agglomération. »