Le Ciel prend des couleurs

Théâtre / Après la longue aventure du NTH8, place à celle du Ciel, un théâtre désormais labellisé « scène européenne pour l’enfance et la jeunesse ». Explication de ce nouveau projet, toujours très ancré sur le territoire et en lien avec les habitants du quartier des Etats-Unis (8e arr.) avant l’inauguration le 17 juin.

« On ne sait plus très bien qui a eu l’idée de ce nom, Ciel » disent de concert Amélia Boyet et Matthieu Loos nommés officiellement le 1er janvier dernier lors d’un deuxième appel à candidatures – le premier ayant été jugé infructueux par des tutelles quoi n’avaient alors pas encore bien défini leurs ambitions pour ce lieu de 160 places. « On voulait jouer avec le 8 qui devient le signe de l’infini à l’horizontal puis le mot Ciel est arrivé ; même un gamin de 3 ans peut s’en souvenir » ajoutent-ils. Et c’est précisément l’un des enjeux de leur arrivée ici : en faire un lieu familial accessible de la petite enfance aux grands ados et bien sûr à leurs familles sur le temps scolaire, périscolaire et à tous, ouvert en conséquence sur des périodes désertées par les théâtres : les vacances scolaires (celles de Toussaint et d’avril en l’occurrence). Sur les 70 levers de rideaux de la saison prochaine, 30 se feront en séances scolaires. Cet ancrage dans le 8e, Matthieu Loos en parle comme d’un cerf-volant « solidement arrimé à cet arrondissement pour rayonner bien au-delà », et notamment en Europe. Trois quarts des treize spectacles programmés sont issus d’artistes allemands, espagnols, irlandais, italiens, néerlandais et belges (4 focus sont consacrés à ce pays bicéphale). Le Ciel ouvre la même saison que Tiago Guedes dévoile sa première saison à la Maison de la Danse (voisin de quelques minutes à pied) et le Portugais a justement imaginé un 8e festival qui se déploiera en mai 2024 dans ces deux sites mais aussi dans les MJC et l’espace public. Les collaborations qui s’annoncent sont tout sauf du rafistolage. Elles semblent être dans l’ADN des deux directeurices. La Biennale de la danse trouve là sa scène jeune public avec Promise me ou le tube enchanteur et inoubliable de Phia Ménard, L’Après-midi d’un foehn. Et quand Sens interdits s’immisce ici, c’est Matthieu Loos qui prend en charge la mise en scène de textes d’enfants gazaouis sur leur ressenti de la guerre (Les Monologues de Gaza) tant il a déjà fait ses preuves en la matière – avec sa compagnie Combats absurdes, il a travaillé à plusieurs projets européens (« Should I stay or should I go ? » de 2013 à 2015, « Our Lives » de 2017 à 2019) et il est ces jours-ci en représentation au théâtre de l’Elysée avec la remarquable Théorie des fragments.

Du 8e à l'Europe

Et puis le Ciel sera terre d’accueil d’un TNG toujours privé de sa grande salle de Vaise, en complète réfection. Amélia Boyet y a travaillé en charge des relations avec les publics quand Matthieu Loos y travaillait sur un projet politique de la Ville. C'est là qu'ils se sont rencontrés et c'est naturellement qu’ils accueillent la prochaine création d’Adèle Gascuel, Sirène 2428 (en janvier) sur une sirène mi-femme mi-cabillaud, quand les humains sont obligés de s’hybrider avec des animaux pour préserver leur patrimoine génétique et culturel ! Plus qu’alléchante, la programmation alterne théâtre, danse, cirque, manipulation d’objets ou de marionnettes et fait revenir pour ses toutes dernières dates Vilain ! d’Alexis Armengol, un spectacle monstre, foisonnant, étourdissant sur une gamine orpheline déchaînée, joyeuse, tout autant que scalpée par la douleur de l’abandon dans lequel l’actrice Nelly Pulicani partage le plateau avec un musicien et une plasticienne live.

Avec un budget de 600 000€ (largement porté par la Ville de Lyon qui assure 195 000€, le loyer et les fluides puis la DRAC pour 160 000€ et la Région à hauteur de 130 000€ à quoi s’ajoutent des recettes propres et quelques financements au projet), le théâtre n’est évidemment pas qu’un lieu de diffusion, il va aussi faire place à des projets participatifs d’ampleur : « Le Ciel en commun » avec des élèves de classes de primaires, des résidents d’Ehpad et des jeunes passionnés de cinéma sur la perception du temps avec Thomas et Bertrand Guerry. Puis « Permis de construire », mené notamment avec le Collectif X pour réfléchir à la notion d’espace commun.

À noter que la tarification est la même que l’on soit enfant ou adultes (8€ max, 5€ pour ceux qui auront acquis la carte du Ciel à 20€).

« On a l’espoir de semer des germes de résistance, de tolérance, dans les futures générations, on a envie de proposer des œuvres qui ne soient pas des formes édulcorées, infantilisantes ou seulement divertissantes mais qui viennent questionner, heurter parfois, faire réfléchir sur le monde dans lequel on grandit » dit Matthieu Loos, plein d'idées pour ce Ciel naissant. Et qui a tout pour se faire une place dans la constellation européenne du théâtre dit « jeune public », un secteur très singulier des arts vivants qui ne s’est structuré que dans les années 1970 – à Lyon, c’était, entre autres, avec une certaine Biennale des Jeunes années (1977-2007) avec Maurice Yendt et Michel Dieuaide. L'histoire continue !

 


 À ciel ouvert

Inauguration samedi 17 juin

De 11h à 22h, le samedi 17 juin, l’équipe du Ciel vous propose de voir la fin de la réalisation de la grande fresque faite sur le mur par Tank & Popek mais il y aura aussi un jeu de piste dans le théâtre (à 13h et 14h), des foodtrucks, des ateliers magie et sérigraphie, un spectacle Hai, la pêcheuse de rêves (à 11h et 16h, dès 3 ans, 5€/8€), théâtre d’objets par une troupe espagnole. Le soir, à 19h, les circassiens acrobatique se lancent à six dans un ballet aérien en plein air (gratuit) avant un Dj set.

 

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