Cinq expositions particulièrement fortes à découvrir ce mois-ci. Particulièrement différentes aussi, avec la gifle morale que nous inflige Mathieu Pernot au sujet des migrants, trois expositions d'art contemporain, et quelques artistes plus "anciens" exposés au Musée Couty.
Une fort belle collection à Artissima
Dans un bel écrin de 1800 m² en bord de Saône, les époux Philippon ouvrent au public une partie de leur collection d'art contemporain. Soit quelque 180 œuvres de styles et de médiums différents (dessin, peinture, sculpture, photographie...). On y découvre, à travers des œuvres fortes, quelques artistes phares comme William Klein, François Morellet, Pierre Soulages, Georges Segal, Yan Pei-Ming, Eugène Leroy... Et, surtout, l'accrochage fourmille de "belles" surprises avec, par exemple, un dessin à couper le souffle de Jérôme Zonder, une grande photographie où deux livres semblent flotter dans le néant du chinois Jiang Zhi, une immense toile mi-féérique mi-gore de Muriel Rodolosse, un chandelier peint en version fantomatique par Milène Sanchez...
Artissima, 673 chemin de la plage à Rochetaillée-sur-Saône.
La collection est visible sur réservation jusqu'à la fin du mois d'octobre.
La honte d'être un homme à la BM de la Part-Dieu
C'est une sorte de sentiment de dégoût de soi, de honte de soi, qui peu à peu nous envahit en découvrant l'exposition du photographe Mathieu Pernot à la Bibliothèque de la Part-Dieu. De Mossoul ou Homs détruites aux camps de fortune de Lesbos ou à la "jungle" de Calais, en passant par la Méditerranée, Mathieu Pernod photographie depuis une dizaine d'années ceux que l'on nomme de manière générique et trop floue « les migrants ». Ses images leur redonnent visages, histoires, géographies, gestes quotidien... Et nous jettent au regard un profond sentiment de culpabilité à rester passifs en la matière.
Mathieu Pernot, L'Atlas en mouvement
À la Bibliothèque municipale Part-Dieu (Lyon 3e), jusqu'au 1er juillet
Photo : Feu de camp, Moria, Lesbos © Mathieu Pernot, ADAGP, 2023
Art moderne à Lyon et au-delà au Musée Couty
Hommage au "Salon des peintres témoins de leur temps" (qui eut lieu à Paris de 1951 à 1982), l'exposition du Musée Couty réunit une quarantaine d'artistes qui y ont participé. Avec de nombreux Lyonnais tels qu'André Cottavoz, Jean Couty, Jean Fusaro, Jean Puy... Mais aussi, et surtout, quelques grandes figures de l'art moderne français : Picasso, Chagall, Matisse, Rouault, Van Dongen... L'accrochage est un peu « lourd » (trop d'œuvres à notre goût) et mal agencé (des œuvres qui voisinent entre elles sans lien aucun), mais l'exposition est à voir pour ses nombreuses « pépites » : une Croisette cannoise de Cottavoz fascinante, de poignants dessins de Matisse, une superbe nature morte de Georges Braque...
De Matisse à Chagall. L'aventure des peintres témoins de leur temps
Au Musée Jean Couty (Lyon 9e), jusqu'au 28 janvier 2024
Photo : Henri Matisse (1869 - 1954) Modèle endormi, 1935 Graphite sur papier, 28 x 38 cm © Succession H. Matisse
Vies de chiens
Les nombreux "toutous" (caniches, teckels et autres petits "bâtards") sculptés sur bois par Nicolas Jullien occupent le sol de la galerie Slika plongée dans la pénombre. Le tout baigné d'une musique électronique composée par l'artiste. Roux, noirs, bruns ou blancs, ces chiens nous jettent de curieux regards de leurs billes parfois un peu hallucinées, confiantes ou distantes. Ils peuvent paraître sympathiques ou hostiles selon les cas. Certains tournent sur eux-mêmes, d'autres allongés semblent plongés dans un demi-sommeil, d'autres encore, plus drolatiques, exécutent une sorte de poirier !
Nicolas Jullien, Ni dieux ni maîtres,
À la Galerie Slika (Lyon 2e), jusqu'au 18 juin.
Photo : Nicolas Jullien, Ni dieux ni maîtres
Galeries sœurs à Kommet
Blanche et Louise Lafarge, artistes multimédia et pluridisciplinaires, présentent une double exposition dans les galeries Kommet et Roger Tator, proches géographiquement l'une de l'autre. Dans cet entre-deux, c'est du corps en mouvement dont il est question dans tous les sens du terme : corps en déplacement, corps en mutation, corps en déformation jusqu'à l'informe ou l'infime. Films, sculptures viendront matérialiser autant que dématérialiser ces devenirs du corps...
Blanche et Louise Lafarge, Nos corps encodés
À Kommet (Lyon 3e) jusqu'au 13 juillet et à la Galerie Roger Tator (Lyon 7e) du 8 juin au 26 juillet.
Photo : Blanche et Louise Lafarge