Trompe la mort

Photographie / Assidûment hantée par la figure de la mort, l’œuvre de Jean-Baptiste Carhaix est célébrée à juste titre à la Bibliothèque Municipale de la Part-Dieu. Un hommage nécessaire quelques mois après sa disparition.

Nichée au quatrième étage du bâtiment conçu par Jacques Perrin-Fayolle, l’exposition consacrée au photographe disparu en mars dernier, offre dans un espace étroit une saisissante quantité de déclinaisons de représentations de la mort.

Danser avec la mort

Choisissant la figure de la camarde pour illustrer la rétrospective, les commissaires Yves Cadet et Thaïva Ouaki ont opté pour un titre aussi évocateur que ponctuel. L’image allégorique s’insinue dans la culture européenne pour délivrer la mort de son triste épilogue : la camarde s’oppose ainsi à la figure de la Faucheuse en théâtralisant sa représentation, provoquant un dynamisme chorégraphique et ludique. Les séries des Danses macabres et des Vanités mettent véritablement en scène ce désir de conspirer avec la mort par l’aspect compositionnel (l’intense autoportrait de Danse avec la mort) ou l’ironie des titres (Croque-Monsieur présente un alligator mordant un squelette en plastique).

Le thème traverse également la série la plus célèbre du photographe, Sisters of Perpetual Indulgence, consacrée à une congrégation fictive de San Francisco très impliquée dans la lutte contre les discriminations et dans la sensibilisation aux thématiques liées au SIDA. Si l’exposition s’ouvre sur la dernière série inachevée des bunkers allemands de la côte atlantique, où l’élément mortifère est détourné par l’ironie du temps et de la nature, elle se clôt sur Enfances, section incarnant une dimension plus colorée – voire kitsch – où la finitude de l’être humain s’avère dépouillée de toute crainte révérencielle.

La Camarde. Photographies de Jean-Baptiste Carhaix
À la Bibliothèque de la Part-Dieu jusqu’au 2 mars 2024