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Clap de fin pour la galerie de photographies Le Réverbère

Clap de fin pour la galerie de photographies Le Réverbère

Perte pour le 8ᵉ art / Après 43 ans d'engagement pour la photographie contemporaine, la galerie Le Réverbère, symbole de l'art photographique à Lyon, fermera définitivement ses portes. Retour sur une épopée qui a façonné le regard sur la photographie en France.

Avant de devenir la galerie de référence qu'elle est aujourd'hui, Le Réverbère était d'abord une librairie spécialisée en photographie et cinéma, l'une des rares en France à l'époque. Catherine Dérioz et Jacques Damez, ses fondateurs, se sont rencontrés en 1979 : « Quand nous avons lancé ce projet, notre but était de changer le regard sur la photographie et de prouver qu'elle était un art à part entière », se souvient Catherine Dérioz. 

Sans soutien institutionnel ou financier, ils ont fait de la galerie une vitrine pour la photographie contemporaine à une époque où elle était encore très largement sous-estimée. « Nous étions jeunes et animés par la passion. Nous voulions prouver que la photographie avait de multiples écritures, comme tout art », explique Jacques Damez.

Première en France à se consacrer exclusivement à la photographie contemporaine, la galerie Le Réverbère s'est distinguée par son engagement sans compromis. « Nous n'avons jamais été des marchands d'art, mais des découvreurs de talents. Nous organisions les premières expositions de photographes inconnus à l'époque », explique Catherine Dérioz. C'est ainsi que des figures majeures telles que William Klein, Robert Doisneau ou Denis Roche ont croisé leur chemin, tous séduits par la vision et l'esthétique défendues par la galerie.

« Lyon aurait pu devenir une capitale de la photographie » 

Malgré l'ampleur de leur engagement, Le Réverbère a dû faire face à « l'indifférence des institutions locales ». Jacques Damez regrette : « Lyon avait l'opportunité de devenir une capitale de la photographie, mais elle a laissé passer sa chance ». Dans les années 2000, Marc Riboud a souhaité créer à Lyon une institution dédiée à la photographie, comparable à la Fondation Henri Cartier-Bresson à Paris. Il avait même proposé d'y associer son nom et de léguer une partie de son œuvre, demandant à Catherine et Jacques de l'accompagner dans ce projet ambitieux. En dépit du soutien affiché de l'adjoint à la culture de l'époque, Patrice Béghain, ce lieu n'a jamais vu le jour. 

La fermeture de la galerie témoigne aussi d'un modèle économique devenu délétère : « Le fonctionnement d'une galerie de notre taille, sans soutien financier public ou privé, n'est plus viable » explique Catherine Dérioz. Elle doit aussi faire face à la montée en puissance des réseaux sociaux comme Instagram, où l'image est omniprésente mais dématérialisée, la photographie sous sa forme matérielle a perdu de son attrait, en particulier auprès des jeunes générations. « Aujourd'hui, les gens consomment des images sans accorder d'importance à l'objet photographique en tant que tel », observe Jacques Damez.

En parallèle, la galerie a également été confrontée à des charges fixes devenues insoutenables, à des coûts prohibitifs pour participer aux foires artistiques et à un engagement décroissant des collectionneurs. « Ceux qui investissent dans la photographie aujourd'hui sont souvent des spéculateurs, plus intéressés par la rentabilité immédiate que par la passion de l'art », déplore Catherine Dérioz.

« Nous nous sommes battus pour la photographie, pas pour nous »

À cela s'ajoute la difficulté d'avoir maintenu pendant des années des actions bénévoles telles que des médiations culturelles ou la publication de leur carnet Photographie(s) Lyon & co recensant toutes les galeries qui proposent des expos photos à Lyon, sans subvention.

La galerie fermera définitivement ses portes le 28 décembre prochain et la question de la pérennité de son modèle et de l'héritage qu'il laisse derrière lui demeure en suspens. « Nous nous sommes battus pour la photographie, pas pour nous », souligne Jacques Damez avec émotion. Ce qui inquiète désormais Catherine Dérioz et Jacques Damez, c'est la possible disparition de tout ce qu'ils ont construit. « Ce qui nous peine le plus, c'est de voir que cet héritage pourrait s'évanouir, emportant avec lui une certaine idée de la photographie, de l'art et de la transmission », conclut Jacques Damez.

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