Classicisme / Tabata et Ludovic Mey ouvrent une brasserie, voisine de leur restaurant gastronomique.
Quelle sera la tendance food de l'année 2025 ? Aucune idée. D'aucuns doivent actuellement se creuser les méninges pour tenter de les repérer ou de les imposer. Côté table, on a constaté cette année sur le champ de ruine de la bistronomie (qui n'a pas survécu à son vieillissement et aux différentes crises) l'épanouissement d'un côté d'un goût immodéré pour le voyage (on n'hésite plus à mixer les inspirations japonaises, scandinaves et sud-américaines) et de l'autre d'un retour aux traditions. Ainsi, l'éloge du terroir, du connu, du local, qui concernait d'abord les produits – on préfère ce qui pousse ou broute près de chez soi – déborde désormais sur les carnets de recettes. Et l'on redécouvre le "patrimoine culinaire", familial ou national. Ce "en même temps" (la surconnexion et la tradition) est parfaitement incarné par Tabata et Ludovic Mey chez Ombellule. Leur second établissement, Roseaux, qui vient d'ouvrir, assume quant à lui un hommage plein et entier à la tradition culinaire française.
L'espace
Pour rappel, le couple de chefs, qui s'était fait connaître aux Apothicaires où ils avaient glané une étoile Michelin, vient d'emménager sur le cours Roosevelt, en lieu et place du Théodore. Après avoir tout cassé, ils ont ouvert d'un côté un restaurant gastronomique en quête de distinctions. Et de l'autre côté de la cloison, une brasserie, Roseaux – nous y voilà. On est d'abord marqué par la décoration. Si Ombellule cultive l'entre-soi (une petite boîte laquée dans laquelle se lover) ici on valorise l'espace. De longs miroirs cerclés de noir étirent les murs verticalement, tendus vers de grands lustres. On a l'impression (la hauteur, le bruit, l'agitation) d'être attablé dans une grande brasserie parisienne du siècle dernier – alors qu'il ne doit pas y avoir beaucoup plus qu'une vingtaine de tables, doublement nappées de blanc.
Merlan Colbert
La carte annonce la couleur (celle du classicisme) : tournedos Rossini, merlan Colbert, vol-au-vent, pets-de-nonne, etc. On dirait la table des matières de l'Escoffier. Avant les fêtes, on a eu le temps de plonger dans le menu déjeuner, vite expédié : d'abord un céleri rémoulade, de bonne texture (encore un peu croquant, pas trop alangui non plus), agrémenté de croûtons et d'œufs durs. Seule folie ? La sauge dans la mayonnaise. Ensuite, un pavé de poisson posé sur une sauce matelote (fumet et crème). Mais quel poisson ! C'était du maigre, magnifié par une cuisson à basse température, et coloré avant d'être servi sur une mirepoix de carottes et céleri, purée servie à part. Enfin, un dessert dans le ton : une coupe Mariette (poire pochée, sirop à l'eau-de-vie de poire, moelleux marron, glace vanille), quand le millefeuille à la carte (bien doré, garni de crème diplomate) nous faisait de l'œil. La cave étant partagée avec le gastro, elle est pléthorique. On y a aperçu, entre autres, les excellents vins de Patrimonio de Mariotti Bindi (112€).
Brasserie Roseaux
34 cours Roosevelt, Lyon 6e
De midi à 13h45 et de 19h15 à 21h30. Fermé dimanche et lundi.
Menu (déjeuner) 32€. Carte 51€-82€