Une foncière solidaire pour mobiliser les logements vacants dans la métropole de Lyon
Logements vacants / La Métropole de Lyon s'allie au mouvement citoyen Solidarités nouvelles pour le logement (SNL) pour créer la coopérative Logement d'abord, une foncière inédite en France chargée de transformer les logements vacants en habitats accessibles aux ménages les plus précaires.
Photo : Pexels © Willian Justen de Vasconcellos
Dans la métropole lyonnaise, le logement est devenu depuis plusieurs années une problématique majeure. D'un côté, des familles en attente d'un toit, des étudiants à la recherche d'une chambre, des travailleurs précaires ballotés d'un hébergement à l'autre. De l'autre, des appartements clos, parfois depuis des années, dans un parc privé vieillissant.
Selon une étude de l'association d'urbanisme UrbaLyon, environ 6 400 logements restaient durablement vacants en 2022 dans le territoire du Syndicat Mixte d'études et de programmation de l'agglomération lyonnaise qui comprend la Métropole de Lyon, la Communauté de communes de l'Est Lyonnais et la Communauté de communes du Pays de l'Ozo, soit 1, 04 % du parc privé. À Lyon, la situation va de mal en pis, plus de 5 600 logements vacants ont été recensés en 2024, presque le double d'il y a cinq ans. Une augmentation toutefois à relativiser car cette augmentation s'explique en partie par le changement de méthode de comptage des logements vacants depuis la suppression de la taxe d'habitation. Auparavant, le comptage s'appuyait sur le fichier national Lovac, issu des statistiques liées à cette taxe. Désormais, il repose sur une déclaration numérique effectuée directement par les propriétaires, qui ne sont pas toujours à l'aise avec les outils informatiques.
Reste qu'une large part des logements vacants de la métropole sont souvent liés à la vétusté du bâti - 45 % des logements concernés ont été construits avant 1919 selon la Métropole de Lyon - mais aussi à des blocages économiques et réglementaires.
Une foncière pour "faire avec" plutôt que "contre"
Face à ce constat, la Métropole de Lyon et le mouvement citoyen SNL lancent la coopérative Logement d'abord, une foncière solidaire chargée d'acquérir et de réhabiliter ces logements pour les proposer à des ménages précaires. La solution proposée et que plutôt que d'attendre une hypothétique réquisition ou une libération spontanée du marché, de créer un circuit parallèle où la puissance publique agit comme opérateur immobilier.
Pour amorcer le dispositif, la collectivité engage 1, 3 million d'euros, doublés par des fonds associatifs et privés (Alynea, Lasho, Crédit mutuel, Vilogia, pour ne citer qu'eux), avec l'objectif de mobiliser 14 millions d'euros d'ici 2028. En parallèle, elle compte mobiliser son propre parc de logements vacants afin de donner l'exemple. Chaque bien acheté fera l'objet d'une rénovation complète avant d'être loué à des tarifs proportionnés aux ressources des ménages.
Le principe s'inscrit dans une politique nationale du "logement d'abord", déjà expérimentée à Lyon à travers d'autres programmes (louer solidaire, lutte contre l'habitat indigne, conventions avec l'agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis pour récupérer des biens saisis).
Contrainte ou volontariat ?
L'autre défi tient à la nature même du dispositif. Pour fonctionner, la foncière devra convaincre des propriétaires privés de céder ou de vendre des biens souvent dégradés, parfois hérités, voire détenus par des investisseurs inactifs. Une tâche d'autant plus complexe que la loi Climat et Résilience, en interdisant la location des logements classés G au diagnostic de performance énergétique dès 2025, risque paradoxalement d'accroître la vacance sans incitation forte à la rénovation.
En somme, la Métropole fait le choix du volontariat là où d'autres prônent la contrainte. Le président Bruno Bernard a reconnu publiquement que « la loi ne permet pas aujourd'hui de réquisitionner les logements vacants » rapporte Tribune de Lyon. Une assertion en réponse à la proposition de la candidate France insoumise aux municipales de Lyon Anaïs Belouassa-Cherifi qui suggérait la réquisition des logements vacances sur l'antenne de BFM Lyon : « Nous pourrions réquisitionner ces logements vacants, c'est une des prérogatives d'une mairie ».
Si cette foncière se veut pionnière en France, son périmètre pèse peu face à la forte demande estimée de ménages en attente dans le fichier métropolitain. La Métropole, privée d'un véritable droit de réquisition, agit à la marge d'un marché immobilier qu'elle ne maîtrise pas. Ses outils - chartes, conventions, incitations - peinent à endiguer la flambée des prix dans le privé comme la pénurie de logements sociaux.

