Des rêves éveillés

Surréalisme / Né au tout début du XXe siècle, Buñuel se jette rapidement dans le bain de l'émulation artistique et intellectuelle madrilène de l'époque. Il devient pote avec Salvador Dalí et Federico García Lorca, et s'inscrit logiquement dans la mouvance surréaliste. À peine débarqué à Paris pour étudier le cinéma, il devient l'assistant de Jean Epstein sur L'Atlantide, et conçoit avec Dalí le premier prototype de fiction cinématographique surréaliste, Un chien andalou, qui reste, presque 80 ans après, un classique absolu de cinéma symboliste, où le sens naît du choc entre des images a priori sans lien entre elles. Le rasoir qui tranche l'œil (premier effet gore de l'histoire du cinéma), l'homme à la main perforée dont sortent des fourmis, le prêtre qui tire un piano lesté par des ânes ficelés (la source de l'expression «le poids d'un âne mort» ?)... Anticléricalisme, désir violent, force du fantasme contre la réalité, tout Buñuel est déjà là ! Son film suivant, L'Âge d'or, lui permet d'explorer un autre thème surréaliste fort : l'amour fou. Mais c'est surtout la manière dont il transforme une procession d'évêques en exposition de squelettes qui marquera les esprits et vaudra au film une interdiction totale pendant 50 ans... Par la suite, les rapports entre Buñuel et le surréalisme seront plus discrets, accompagnant la mort du mouvement. Mais les scènes de rêve transgressif se retrouvent tout au long de son œuvre ; cette confusion intime entre réalité et onirisme est même au cœur de La Vie criminelle d'Archibald de la Cruz et Belle de jour, quand les frontières ne sont pas brouillées de la première à la dernière image comme dans ces films jumeaux que sont L'Ange exterminateur et Le Charme discret de la bourgeoisie. Mais il faudra attendre les derniers feux de sa carrière pour que Buñuel signe un film profondément surréaliste dans sa structure comme dans son propos : Le Fantôme de la liberté, suite de scènes sans raccord entre elles et ne pouvant être comprises que par une interprétation sauvage, retrouve cette logique du rêve qui, de Dalí à Breton, est au cœur du projet surréaliste. CC

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Mercredi 31 janvier 2007 Interview / Martin Barnier, professeur en études cinématographiques à l'Université Lumière Lyon 2, présentera quatre films de la «période mexicaine» de Buñuel les 6 et 7 février. Propos recueillis par CC

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