Théâtre découverte / Nuits blanches pour maison jaune. La jeune compagnie de la Maison Jaune composée de comédiens et techniciens issus de l'École Nationale Supérieure Arts et Techniques du Théatre (ENSATT) a choisi «Les Nuits blanches» de Dostoïevski pour premier projet. Ce court roman de l'écrivain russe est bien antérieur aux monuments que seront vingt plus tard «Crime et châtiment» ou «L'Idiot». Pourtant, il évoque déjà des personnages englués dans leur destin. Le narrateur est un rêveur, un solitaire dans la grouillante ville de Petersbourg. Il croit n'avoir besoin de personne, mais tombe amoureux d'une fille rencontrée au hasard d'une déambulation nocturne. Et voilà que ces deux timides se confessent l'un à l'autre sur un banc public quatre nuits durant. Alors qu'ils n'ont l'air d'être touchés par rien, ils se révèlent infiniment poreux au monde qui les entoure. C'est alors que les comédiens peuvent interpréter avec justesse tout une palette de sentiments. Aymeric Lecerf, repéré notamment dans les dernières créations de Christian Schiaretti au TNP, est ici dans une configuration beaucoup plus intimiste que sur la scène de Villeurbanne. Proche du public, il peut susurrer à l'oreille des spectateurs ses émois naissants pour cette jeune fille qui en aime un autre : «il ne vous vaut pas et pourtant je l'aime plus que vous», lui avoue-t-elle. Parfois désuet, ce texte n'en demeure pas moins séduisant. Dans une lumière de clair de lune, le temps semble s'être figé dans la Russie du XIXe siècle. Mais en réalité, ce songe intemporel trouve un écho certain en 2010.
Nadja Pobel
Les Nuits blanchesÀ l'Espace 44 jusqu'au domanche 14 février.
