D'autres vies que la nôtre

Avec la deuxième édition du festival Sens interdit à l'automne, Patrick Penot, directeur artistique, et par ailleurs co-directeur des Célestins, fait une promesse : réaffirmer l'essence politique du théâtre. Décryptage du contenu de cette programmation aussi alléchante que nécessaire. NP

En 2009, Patrick Penot avait porté ce projet un peu fou de proposer du théâtre d'ailleurs. Cinq pays étaient alors invités dans dix salles de l'agglomération. La thématique casse-gueule «Identités, mémoires et résistances» n'a pas effrayé le public qui est venu en masse. Il est donc possible d'être exigeant et de répondre aux attentes des spectateurs dans un même élan. En deux ans, c'est un euphémisme de dire que la scène politique française a passé à la broyeuse ces concepts forts en les offrant en pâture au populisme via, par exemple, un vrai-faux débat sur l'identité nationale. Patrick Penot a donc gardé la même thématique et convié onze spectacles venus de dix nations de tous les continents (à l'exception de l'Océanie) joués en douze langues (du dari au mapuche, du khmer au bambara en passant par les plus usités arabe, russe, anglais, néerlandais, allemand, polonais ou espagnol). Mais au-delà des chiffres, ce festival est surtout une cage de résonance aux cris venus de différents endroits du globe à commencer par la Tunisie pré-révolution.Ailleurs, c'est ici
Quelques mois avant le renversement du despote Ben Ali le 14 janvier dernier, Jalila Baccar et Fadhel Jaïbi créaient Yahia Yaïch Amnesia à Tunis, une pièce sur... la chute d'un despote. Ce spectacle à la fois tragique et d'une ironie mordante, au croisement de la danse et du théâtre, est aussi captivant par la beauté de sa chorégraphie que par son discours tranchant. D'autres faits très contemporains sont évoqués dans ce festival, notamment la vie d'un soldat tchétchène dans Une guerre personnelle d'après les récits d'Arkadi Babtchenko ou la lutte des chiliennes pour faire survivre leur communauté Mapuche. Toujours au Chili, l'Allemand Cristián Plana, installé depuis longtemps à Santiago, fait revivre l'écriture acerbe de Thomas Bernhard avec une troupe sud-américaine et évoque, via les Dramuscules, les crimes nazis commis au Chili et passés sous silence par Pinochet. Enfin, ce festival est aussi une occasion de revoir les Afghans du Théâtre Aftaab déjà invités de la première édition. Bien peu dirigés par Matthias Langhoff dans la création de l'ENSATT en juin dernier, ils sont ici mis en scène par Hélène Cinque et racontent le Kaboul d'aujourd'hui dans Ce jour-là. Le théâtre du Soleil d'Ariane Mnouchkine qui produit ce spectacle sera également représenté par la re-création de la fable d'Hélène Cixous L'Histoire terrible mais inachevée de Norodom Siahnouk avec des comédiens cambodgiens. Cette pièce se prolongera au-delà du festival, aux théâtres de Villefranche et Vénissieux puis dans la région.Festival Sens interdits
Du 21 octobre au 9 novembre.

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