Théma / Place aux jeunes ! Devant (parfois aussi derrière) la caméra, les grands ados métaphorisent à l'écran les métamorphoses dont ils sont les témoins privilégiés. Il y en a pour tous les goûts...
Débutons par une débutante très exposée, Suzanne Lindon et ses Seize Printemps (sortie le 16 juin), vraie fausse auto-fiction autour d'une néo-effrontée du (très) beau Quartier Latin parisien, tombant en pâmoison face à un comédien de théâtre trentenaire... Disons que c'est conforme à ce que l'on peut en attendre, pour le pire et le meilleur : naïf et autocentré (c'est le sujet), le fait qu'il soit interprété par la réalisatrice interroge sur la distance qu'elle veut poser par rapport à son personnage. Y a-t-il du recul, de l'ironie par rapport à certains clichés propres à ce genre de films, au milieu qui est le sien et qu'elle décrit, à son recours un peu gratuit à la comédie musicale (en hommage à Decouflé ?), à sa personne ? Il faudra attendre son prochain film pour être fixé.
Freaky de Christopher Landon (sortie le 23 juin) offre de son côté une vision franchement plus décalée de l'irruption dans le monde des adultes, puisqu'elle reprend en mode comédie horrifique, production Blumhouse oblige, le désormais classique switch de Freaky Friday : l'échange de corps entre deux personnages — la permutation se faisant ici entre une ado et un tueur en série pervers au possible. Le film fonctionne sur deux tableaux puisque le gore symbolisant les pulsions ou tabous obsédant les lycéens se trouve dédramatisé par le registre multi-référentiel et parodique. Efficace et distrayant.
Soyons sérieux
Connu comme comédien, Samir Guesmi passe derrière la caméra (mais reste aussi devant) pour Ibrahim (sortie le 23 juin), conte contemporain initiatique comme il est convenu de dire, d'un ado aux mauvaises fréquentations tentant de se racheter aux yeux de son père illettré (et édenté) en compromettant un peu sa jeunesse et sa fraîcheur. Entre les lignes, on retrouve des thèmes sociaux et des axes (mélo) dramatiques hugoliens dans ce qui ressemble à un court-métrage distendu, où Philippe Rebbot étonne en micheton fortuné amateur de chair fraîche.
Signé Fanny Liatard & Jérémy Trouilh, Gagarine (photo, sortie le 23 juin) est quant à lui la version prolongée d'un court-métrage homonyme et éponyme de la cité où les films ont été tournés. On y suit l'odyssée intérieure de Youri, ado livré à lui-même dans une cité proche de la destruction qu'il va investir avec, notamment, l'aide d'une Rom de son âge. Entre vision réaliste et méditation parabolique, cette observation des villes satellites que sont les banlieues raconte soixante ans d'histoire de France avec une mélancolie poétique digne de Bowie. Un premier film orbital et prometteur.