Sélection / De l'humour (beaucoup), du théâtre (pas mal), de la danse (un peu) et même du chant : voici notre programme pour ce premier mois lyonnais de 2025. Bonne année !
La Réunification des deux Corées
Joël Pommerat est tout bonnement l'un des metteurs en scène français les plus passionnants de ce début de siècle, qui livre des spectacles inoubliables qui, à coup sûr, marqueront l'histoire du théâtre. À l'image de sa Réunification des deux Corées, création de 2013 sur ce que l'on appelle communément l'amour — celui qui submerge, assomme, broie... Pour cette reprise, tout est une nouvelle fois juste, précis, fort, du texte pensé en séquences indépendantes au jeu des comédiens et comédiennes (de véritables Rolls-Royce) en passant par la scénographie en ombres et lumières ciselées. En un mot : magistral.
AM
La Réunification des deux Corées
Du 7 au 17 janvier aux Célestins (Lyon 2ᵉ), de 5 à 40 euros
Maldonne
C'est le succès surprise du moment, à la tournée conséquente partout en France : Maldonne de la chorégraphe Leïla Ka, où cinq danseuses et une quarantaine de robes rendent hommage au féminin en questionnant les carcans imposés aux femmes ; le tout sur une bande-son éclectique allant du classique à la chanson française. Si cette danse sororale aux accents théâtraux n'a pas la même intensité selon les tableaux, elle renferme tout de même une générosité évidente qui donne envie de suivre de près le travail de Leïla Ka – sœur de la chanteuse Zaho de Sagazan pour l'anecdote.
AM
Maldonne
Les 8 et 9 janvier à la Maison de la danse (Lyon 8e) ; de 13 à 32 euros
Plutôt vomir que faillir
« Du collège, je garde le souvenir amer de n'avoir rien compris à ce qui m'arrivait. De prendre de pleine face et sans casque les codes d'une société nouvelle. D'avoir vécu mille violences et perditions dans l'enceinte de mon corps et de la cour. » Avec Plutôt vomir que faillir, la metteuse en scène afroféministe et lesbienne Rébecca Chaillon s'adresse au public adolescent. Son spectacle foisonnant est ainsi centré sur des jeunes en construction qui ne correspondent pas forcément aux standards d'une société soi-disant universaliste mais surtout excluante pour qui s'écarte de la norme — culturelle, sexuelle, physique... Une création de 2022 joyeusement réparatrice riche en images colorées, notamment autour de la nourriture — d'où le titre. Énorme coup de cœur.
AM
Plutôt vomir que faillir
Du 14 au 17 janvier au Théâtre de la Croix-Rousse (Lyon 4ᵉ) ; de 6 à 29 euros
Glenn, naissance d'un prodige
La mise en scène, les costumes, la direction d'acteur... De prime abord, tout, dans le succès théâtral Glenn, naissance d'un prodige, est honnête, un brin suranné, sans grande surprise. Et pourtant, l'ensemble fonctionne parfaitement, tant l'auteur et metteur en scène Ivan Calbérac démontre la confiance qu'il a placée dans son sujet, qui n'est autre que le pianiste canadien de génie Glenn Gould (1932-1982), célèbre notamment pour ses deux enregistrements des Variations Goldberg de Jean-Sébastien Bach.
AM
Glenn, naissance d'un prodige
Le 17 janvier au Toboggan (Décines-Charpieu) ; de 24.50 à 35 euros
Tout est dans la voix
Figure télévisuelle (La France a un incroyable talent, Nouvelle Star...) mais surtout artiste touche-à-tout décalée, Marianne James remonte sur les planches avec le bien nommé spectacle Tout est dans la voix. Une sorte de grande leçon de chant parfois participative (elle accueille le public en mode cheffe de chœur) qu'elle défend avec tout son charisme, son bagou et ses connaissances sur ce drôle d'instrument qu'est la voix. Efficace.
AM
Tout est dans la voix
Le 17 janvier à l'Espace Écully ; de 20 à 24 euros
Le 25 janvier au Centre culturel Jean-Moulin (Mions) ; de 15 à 24 euros
La Fracture + Koulounisation
Une soirée, deux spectacles sur l'Algérie. D'abord La Fracture de Yasmine Yahiatène, que nous n'avons pas vu, qui traite de la relation au père. Puis Koulounisation de Salim Djaferi, astucieuse fausse conférence sur le poids des mots des deux côtés de la Méditerranée, et notamment ceux de la guerre d'Algérie. Comment dit-on « colonisation » en arabe demande Salim Djaferi un jour à sa mère ? « Koulounisation » lui répond-elle, alors que lui attendait un mot arabe. De là commencera une passionnante enquête aux frontières de l'intime, retranscrite sur scène avec pas mal d'humour.
AM
La Fracture + Koulounisation
Du 21 au 24 janvier au Théâtre de la Croix-Rousse (Lyon 4ᵉ) ; de 6 à 29 euros
Entropie
L'être humain brûle de l'énergie pour, dès qu'il a du temps, scroller sur son téléphone : voilà qui laisse pantois Karim Duval, qui a fait de ce constat (et d'autres) le cœur de son nouveau spectacle. Sur scène, l'humoriste n'est jamais autant savoureux que quand il pointe les incohérences et autres aspects ridicules de notre monde toujours plus rapide mais toujours plus vain.
AM
Entropie
Du 22 au 24 janvier à l'Espace Gerson (Lyon 5ᵉ) ; de 13 à 18 euros
Le 25 janvier au Lissiaco (Lissieu) ; de 5 à 20 euros
Constance
« J'ai longtemps cru que j'étais invincible. Jusqu'à ce que je me prenne les pieds dans mes émotions et dans ma vie. Et quand tout a éclaté autour, et à l'intérieur de moi, j'ai dû réapprendre à vivre. Bien heureusement, ma fidèle plume et mon petit esprit facétieux ne m'ont jamais abandonnée. » Elle avait tout pour réussir (les tournées, l'exposition médiatique, le succès...) et pourtant elle n'a pas tenu. En mettant en avant dans Inconstance, son sixième spectacle, la lourde dépression qu'elle a subie (avec à la clé passages en hôpital psychiatrique et tentatives de suicide), l'humoriste Constance bouleverse autant qu'elle fait rire. Du grand art.
AM
Inconstance
Le 24 janvier au Briscope (Brignais) ; de 24 à 33 euros
Gangster·e·s
C'est le retour de la compagnie du Théâtre Marguerite fondée par Marguerite Thery il y a trois ans. Après le très convaincant Cabaret des indociles sur des filles dites « mauvaises » et enfermées dans les années 1950 dans un couvent pour être « rééduquées », la metteuse en scène poursuit son travail avec d'autres rebelles en nous emmenant dans un bar à la rencontre d'un groupe de tueurs à gage. À nouveau elle convoque la comédie musicale, présente dans le précédent spectacle sans que ça en soit un aspect qui étouffe tout le reste. Et gageons qu'en jouant avec les codes des films de genre, Gangster·e·s, créé aux Clochards célestes, soit aussi de la dynamite.
NP
Gangster·e·s
Du 24 au 31 janvier aux Clochards célestes (Lyon 1ᵉʳ) ; de 8€ à 14€
Guillermo Guiz
L'un des meilleurs spectacles de stand-up du moment s'appelle La Formidable ascension sociale temporaire de G. Verstraeten. Un titre à rallonge signé Guillermo Guiz, enfant d'un milieu populaire qui livre une acide réflexion sur sa condition d'artiste nouveau bourgeois. Une immense réussite pleine d'autodérision (sur, par exemple, la vacuité de son métier face à l'urgence climatique), de savoureuses digressions (que ce soit sur son état d'homme blanc hétérosexuel ou les hôtels en tournée) et un humour noir particulièrement efficace – sacré Grégory Lepetit, ou plutôt petit Grégory.
AM
La Formidable ascension sociale temporaire de G. Verstraeten
Le 28 janvier à la Bourse du Travail (Lyon 3ᵉ) ; de 29 à 37 euros
Malik Bentalha
En voilà une promo réussie ! Grâce à une poignée de vidéos parodiques hilarantes (un débat sur CNews, un morceau du rappeur Jul, une rencontre avec son manager au sujet de la flamme olympique...), l'humoriste et acteur Malik Bentalha a intelligemment su teaser le Nouveau monde qu'il a lancé en octobre. Au vu de ce qu'il explique en interview, ce spectacle (que nous n'avons pas vu) parle beaucoup de lui, et notamment de passages difficiles comme le burn-out et la dépression qui l'ont récemment affecté. Le tout en riant ?
AM
Malik Bentalha
Le 29 janvier à la Halle Tony-Garnier (Lyon 7ᵉ) ; de 47 à 52 euros
