Cas d'école

par
Mercredi 1 mars 2006

Musique / Folk naturaliste et sophistiqué d'une part, country adolescente et rugueuse d'autre part, Laura Veirs et Willy Mason délivrent deux visions singulières de l'essence musicale américaine.Emmanuel Alarco

À à peine 20 ans, Willy Mason a surgi de nulle part il y a tout juste un an, armé d'un premier album qui aujourd'hui encore nous fout le cul par terre. Ce fils de folkeux pur jus, élevé sur une île de la côte est des Etats-Unis, a démarré à l'ancienne, en trimballant ses chansons sur les scènes ouvertes new-yorkaises. Découvert par un autre (un peu moins) jeune prodige, Conor Oberst (Bright Eyes) qui le signe sur son label, Mason enregistre son premier album en 2004 (Where the humans eat), accompagné quasi-exclusivement de son jeune frère Sam à la batterie. Sa voix de vieux cow-boy éthylique y fait des miracles, tiraillée entre les fondements très roots des compositions et leurs aspirations mélodiques supérieures ; un grand écart stylistique magnifié par quelques fulgurances aux arrangements finauds (violoncelle, accordéon, vibraphone...). Sans préjuger de l'avenir du garçon, on se contentera de garder d'ores et déjà une place au paradis des folk-songs à l'avant-dernier morceau du disque, Oxygen, dont les couplets, reposant sur seulement trois notes de guitare, respirent un idéalisme juvénile bouleversant.L'ÉtudianteLaura Veirs a fait l'école. Cela se voit et cela s'entend. Avec ses lunettes ovales et ses longs cheveux mal fagotés, on l'imagine parfaitement au fond de la classe en élève brillante mais discrète, perdue dans son univers intime singulier ; specimen typique de la fille au premier abord austère, mais gagnant à être connue. Venue à la guitare sur le tard, la demoiselle fait preuve d'un sens de l'arpège distingué évident et maîtrise l'art subtil consistant à faire évoluer une mélodie sur des schémas harmoniques fixes. En gros, les accords ne changent pas, mais la ligne de chant si. Épaulée par son producteur et batteur fidèle, Tucker Martine, Miss Veirs a su avec les années offrir un écrin de plus en plus luxueux à ses miniatures folk. Sur Carbon glacier (2004) et plus encore Year of meteors (2005), la précision du travail sur la matière sonore impressionne : bidouillages électroniques, percussions, claviers, alto ou guitares, chaque intervention instrumentale semble mûrement réfléchie et le tableau final agencé avec soin. Mr Martine a dû faire l'école aussi... En vrai, Laura Veirs a bel et bien un passé d'étudiante. En géologie. C'est peut-être un détail pour vous, mais... cette passion avouée pour la caillasse et les éléments naturels en général, coule dans les vers de Laura et dessine les contours d'un univers panthéiste où l'on parle singulièrement de choses tout à fait banales (la vie, l'amour, les gens...). Nous sommes en février, il est encore temps d'approcher la timide du fond, pour ne pas réaliser à la veille des grandes vacances, qu'en fait : "elle était bien cette fille, on aurait dû lui parler avant".Willy Mason (en 1ère partie de KT Tunstall)Samedi 25 février au Ninkasi KaoLaura Veirs + Vale PoherLundi 27 février à la Marquise