de Mia Hansen-Løve (Fr, 1h40) avec Isabelle Huppert, André Marcon, Roman Kolinka...
Triste exemple de régression artistique, ce film bien mal nommé voit Mia Hansen-Løve retomber dans les travers de ses débuts, dont on la croyait guérie depuis le lumineux Le Père de mes enfants (2009). Ce cinéma sorbonnard, construit dans l'imitation admirative des aînés Eustache, Garrel ou Assayas (évidemment), s'ingénie à aligner des saynètes froides censées capturer la vie dans sa crue réalité, des séquences de comédie pathétique (avec la vieille grand-mère qui perd la boule), entrelardant le tout de tunnels verbeux bilingues franco-allemands fourrés à la dialectique. Parfaitement formaté pour les festivals : la Berlinale lui a décerné un Ours d'argent...
Très proche du personnage qu'elle interprétait (on aurait du mal à dire “incarner” tant son corps physique paraît de plus en plus s'effacer à l'écran) dans Villa Amalia (2009) de Benoît Jacquot, Isabelle Huppert affiche ici la même indifférence face aux événements ; à peine semble-t-elle concernée comme spectatrice. Postulons qu'il s'agit d'une stratégie de protection, car la réalisatrice sadise son héroïne impassible avec une étonnante obstination, au point de la transformer en une sorte de Pierre Richard version prof de philo.
Or cette accumulation de tuiles (séparations, deuil, licenciement...) combinée à une absence de réponse normale (colère, chagrin, etc.) renvoie le portrait d'une femme dépourvue de tout sentiment naturel, parfaitement déshumanisée. Comment, alors, éprouver la moindre empathie pour une personne ne manifestant pas la moindre souffrance ? VR