Mardi 12 octobre 2010 Un jour, je ne sais plus où, un artiste avait compilé les photogrammes des grands films sur lesquels apparaissait le sempiternel «The end». Cela donnait (...)
Coulisses du Festival Lumière 2/4 / C’est la nouveauté de Lumière 2010 : une section, Déjà classiques !, s’intéresse à des films français récents et à leurs cinéastes, conviés à se pencher sur des œuvres tournées il y a plus de trente ans. CC
À partir de quand un film devient-il «ancien» ? À l’heure où une nouveauté chasse l’autre sur les écrans, on serait tenté de dire tout de suite… Mais pour un festival consacré au cinéma de patrimoine comme Lumière, il faut bien se fixer une limite, même flottante. D’une certaine manière, la section Déjà classiques ! fixe cette frontière en exhumant un patrimoine encore récent du cinéma français : des films tournés il y a trente ou quarante ans par des cinéastes toujours en activité, donc susceptibles de venir en parler avec les spectateurs hors de tout plan promotionnel.
Populaire et de qualité
Le choix de ces auteurs cette année n’est cependant pas innocent d’un regard critique sur ledit patrimoine. Claude Lelouch, Costa-Gavras, Jean-Paul Rappeneau, Bertrand Blier et Michel Deville représentent cette frange artisanale, «populaire et de qualité», qui forme une contre-allée aux grands axes du cinéma commercial et de l’auteurisme post-Nouvelle Vague qui constituent le cinéma français des années 70. Dialoguiste et directeur d’acteurs fabuleux, Bertrand Blier est celui qui, avec "Les Valseuses", a inventé l’équivalent français des marginaux flamboyants du cinéma américain à la même époque. Invention de personnages, invention d’une langue mais aussi invention de corps nouveaux, ceux de Miou-Miou, Patrick Dewaere et Gérard Depardieu, qui connaîtront ensuite la postérité que l’on sait. Cinéaste maniaque, aussi à l’aise dans le grand spectacle que dans l’intimisme (d’où la réussite incontestable de son "Cyrano"), Jean-Paul Rappeneau est aussi un cas particulier, et "La Vie de château" reste une comédie singulière que l’on pourrait éventuellement rapprocher de certains De Broca. Avec "Z", Costa-Gavras inaugurait une série de films politiques qui allaient forger son image (même si sa carrière est finalement plus variée que ce seul cinéma engagé) : il y dénonce la dictature des colonels en Grèce, son pays natal, avec une certaine efficacité. Les cas de Claude Lelouch et de Michel Deville sont plus controversés : leur style très reconnaissable (caméra portée et agitée chez Lelouch, rigidité du cadre trouée au montage par l’usage systématique des inserts chez Deville) établissent un étrange maniérisme à la française, mais déconnecté de la modernité cinématographique. Déjà classiques ! ne prend pas de risques cependant en proposant leurs films les plus réussis : "La Bonne Année" pour Lelouch et "Le Dossier 51", puissant film d’espionnage signé Deville.
Lumière 2010
Du 4 au 11 octobre.
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