Cinquième bougie pour Écrans Mixtes, le festival de films LGBT, et jolie édition 2015 avec comme invité d'honneur le cinéaste grec Panos H. Koutras et des films inédits aussi pertinents sur leurs sujets que surprenants dans leurs formes.Christophe Chabert
Queer, festif, décalé, militant : Écrans Mixtes, le festival LGBT fête ses cinq ans avec à son frontispice ses adjectifs-là ; en 2015, il paraît plus que jamais au cœur des questions contemporaines, et pas seulement celles directement liées à l'homosexualité. Ainsi, l'invitation faite au cinéaste grec Panos H. Koutras n'est pas le moindre des symboles — même si sa venue a été annoncée avant la victoire de Syriza aux dernières élections. Koutras a bâti en quatre films une œuvre qui balance entre réalisme et fantaisie, tradition et modernité : de ce faux film Z qu'était L'Attaque de la moussaka géante au road-movie Xenia, Odyssée d'aujourd'hui à travers une Grèce dévorée par la crise et la violence, le cinéaste se plaît à empoigner les mythes, les sujets et les genres pour les passer au prisme d'une modernité queer.
Écrans mixtes propose l'intégrale de ses films — dont l'inédit Real Life, tourné en 2004 — et lui a laissé carte blanche. Il a donc choisi deux films : le classique Stella, femme libre de Michael Cacoyannis — auquel son propre Strella rendait hommage — qu'il présentera à l'Institut Lumière le même soir que Xenia, le jeudi 5 mars, et Johann, mon été 75 de Philippe Vallois, décrit comme «le premier film gay français».
Des hommes debout
Hormis cet événement, Écrans Mixtes propose un panorama du cinéma LGBT récent avec force inédits et avant-premières. La place manque pour parler de tout, on insistera donc sur deux très bons films : d'abord Love is Strange d'Ira Sachs — dimanche 8 mars à 18h30 au Comœdia. Inédit car victime de la pénurie actuelle d'écrans art et essai à Lyon intra-muros, ce superbe mélodrame ténu et pudique où deux sexagénaires new-yorkais se marient avant d'être rappelés, par la violence des rapports sociaux et économiques, à leur double minorité — seniors et gays — bouleverse sans forcer le pathos, par la force d'un regard toujours juste sur ses personnages — et ses acteurs : John Lithgow et Alfred Molina.
Ensuite, Stand de Jonathan Taïeb — samedi 7 mars à 19h30 au Comœdia en sa présence — film français indépendant tourné à la sauvage en Ukraine pour raconter la montée des crimes homophobes en Russie. Raconter, et pas seulement dénoncer : de sa narration à twists jusqu'à ses partis pris de mise en scène audacieux — au cœur du film, un spectaculaire plan-séquence à suspense où l'on passe sans coupe d'une vision objective à une vision subjective de l'action — Taïeb fait du vrai cinéma, intelligent, immersif et engagé, pour un des musts de cette édition.
Écrans mixtes
Du 4 au 10 mars
www.festival-em.org