Paul Erdös n'était pas un mathématicien comme les autres. Il ne s'enfermait pas dans une pièce pour réfléchir à des théorèmes dont tout le monde se fout, il ne jouissait pas après chaque équation à 53 inconnues réussie, il ne nourrissait pas d'obsessions perverses et biscornues. Paul Erdös ne bâtissait pas de théories alambiquées mais résolvait des problèmes, avec simplicité et élégance.Son caractère particulièrement prolifique (il aurait écrit plus de 1500 articles de recherche) conduit les mathématiciens à s'auto-classer selon le Nombre d'Erdös selon leur degré de séparation avec lui. Einstein pouvait par exemple se vanter d'avoir un Nombre d'Erdös de 2.Lunaire, affectueux et autiste, Erdös le hongrois avait peu à peu développé son propre dialecte, mélange de jeux de mots malins et de délires amphétaminés. Chez lui, Dieu était le "Suprême Fasciste", les enfants étaient des "epsilons" (lettre grecque employée en arithmétique pour désigner une faible quantité), se marier c'était "être capturé", divorcer c'était "être libéré", et se re-marier c'était "être recapturé". Accro au benzedrine, au ritalin et aux comprimés de caféine, il n'avait pas de femme, pas d'epsilons, pas d'emploi, pas de passe-temps. Toutes ses affaires tenaient dans une valise et dans un sac orange de Centrum Aruhaz, un grand magasin de Budapest. "Mon cerveau est ouvert", déclarait-il en tapant à la porte d'un collègue mathématicien, chez qui il restait afin de collaborer sur le développement de la théorie de Ramsey ou sur l'application de la méthode probabiliste. Lorsqu'il en avait assez, Erdös s'en allait trouver un nouvel hôte.Il meurt en plein congrès le 20 septembre 1996, à l'âge de 83 ans. Sa vie, son oeuvre, sa philosophie méritent qu'on lui rende hommage en tant que pionnier oublié des mathématiques modernes. Quelques mois encore avant sa mort, il se demandait toujours pourquoi le Suprême Fasciste avait décidé de l'embêter avec cette grippe.

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