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Photo : Busca
Si les discours des hommes politiques s’adressent aux adultes, leurs idées méritent parfois d’être transmises aux enfants. Avec "Crasse paperasse", les Zonzons poussent Guignol à aider des sans-papiers avec — réellement — humanité et cœur dans un spectacle toujours divertissant que ne renierait pas Jean-Luc Mélenchon. Nadja Pobel
Lorsqu’en 1996, Jean-Louis Debré, ministre de l’Intérieur, décide de faire évacuer par mille policiers (!) l’église Saint-Bernard où avaient trouvé refuge 300 sans-papiers, il affirme – sans rire - que ça se passe avec «humanité et cœur». Quinze ans plus tard, la situation n’a guère changé, les sans-papiers sont indésirables partout et la phrase du ministre pourrait être reprise au premier degré par la troupe des Zonzons.
Depuis 1998 en effet, ce collectif s’ingénie à réveiller Guignol, tendre avec les enfants mais toujours aussi indocile avec l’autorité. C’est donc presque naturellement que l’idole des gones se glisse dans ce nouveau récit aux multiples sous-couches dans lequel un couple de Roms est sommé de repartir dans un pays qui ne veut pas de lui et où un enfant est retrouvé abandonné. Luttant contre l’administration trop rigide et des policiers stupides, Guignol tente de redonner place à l’humanité.
Retour à l’envoyeur
Dans ce spectacle, la dialectique ne serait rien sans un décor soigné et riche de petits accessoires, sans ces marionnettes rendues presque vivantes et sans l’utilisation de la vidéo pour une étourdissante montée des virages de la Croix-Rousse en voiture. Car pour faire passer son message, Guignol doit d’abord raconter une histoire dans un environnement pas trop aride. Chansons et adresses au public ponctuent la pièce sans que jamais cela ne nuise au discours. Bien au contraire, ce qui peut paraître caricatural (les accents exagérés des bourgeois bien-nommés Guillemette et Jean-Édouard ou de la Guadeloupéenne Marie-Lavande) est une manière d’être entendu sans détours. Et les scénaristes ne font pas les timides.
Les flics sont rien moins que des incapables incultes uniquement motivés par la récompense de l’apéro ; les bourgeois poussent des cris d’effroi à la vue d’une mendiante et affirment «ne plus être en sécurité nulle part» quand une petite vieille sénile croit s’être fait voler sac à main. Au milieu de toutes ces péripéties, reste que Guignol transmet un message simple : celui de la résistance, prouvant, carte géographique à l’appui, l’absurdité des incessantes reconduites à la frontière pratiquées depuis un millénaire.
Guignol contre crasse paperasse
Au Théâtre Guignol de Lyon, jusqu’au 17 novembre
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