Aux Célestins, un grand Patrick Pineau dans "Black March"

Black March

Célestins, théâtre de Lyon

ce spectacle n'est pas à l'affiche actuellement

Théâtre / En HP, les cabossés ne sont pas toujours ceux qu’on croit. Dans "Black March", Sylvie Orcier tisse les liens entre soignants et soignés en faisant résonner un double de la voie abîmée de Gainsbourg. Belle incursion dans nos failles.

Personne ne marche vraiment droit dans Black March. Ou alors avec des pas trop saccadés, témoignant d’une détermination enragée. Dans les deux cas, rien ne va. D’un bout à l’autre d’un espace bi-frontal, deux soignants tentent de créer un dialogue avec des patients épuisés d’être là et un nouvel arrivant ne parvenant pas à aligner deux mots. Nous sommes dans un hôpital psychiatrique. Claire Barrabès aime écrire sur des sujets inflammables, rugueux voire violents (Smog…).  Et Sylvie Orcier ne laisse pas d’air à ses personnages cernés de tous côtés.

L’autrice suggère que Minona a commis un infanticide, que Bertrand a bousillé sa carrière de grand musicien classique dans l’alcool. Bien sûr, tout n’est pas aussi binaire mais c’est au gré de scènes très concrètes qu’ils se rencontrent : piquer la bouffe de l’autre au self, se laisser tomber la tête dans un bol de purée. Parfois un peu étrange avec une scène d’accouchement hors sol ou à d’autres moments tendant vers le catalogue (oui les personnels hospitaliers, surtout dans ces unités psy, ont trop peu de moyens et n’ont pas le temps de regarder leurs collègues à la dérive – ici Joël va commettre des violences conjugales), ce travail n’en demeure pas moins solide sur le plateau.

Sweet sweet

Parce que s’insèrent dans le théâtre la musique et le chant via la présence presque fantomatique (il se déplace discrètement) et puissante aussi de Pablo Elcoq, Gainsbourg troublant (Black March est une de ses compositions de la bande originale du film L’Eau à la bouche). Alpha Blondy, le Wu-Tang Clan et même les Beatles (I’m so tired) ont le temps durant cette heure vingt de passer par là. Les parenthèses chorégraphiées sont aussi une composante très à propos tant le corps est un langage fondamental de ces patients.

Nonobstant un clin d’œil en forme de private joke que l’on devine moqueur (et bienvenu !) à propos du Livre de la jungle boursouflé de Bob Wilson au Châtelet, Black March est aussi une formidable fable notamment dans la partition offerte à ce grand acteur qu’est Patrick Pineau entouré ici de ses deux enfants. Pineau et Orcier cheminent ensemble depuis plusieurs décennies. L’été dernier, à l’ombre de la Comédie Odéon, dans le cadre des Nuits de Fourvière, ils donnaient naissance à un très exigeant et singulier spectacle de Serge Valletti, John a-dreams. Les revoici en nombre. Bonne nouvelle.

Black March
Aux Célestins (petite salle) jusqu’au vendredi 17 mars

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