Télé Carpenter
Par Christophe Chabert
Publié Jeudi 7 mai 2009 - 1685 lectures
Analyse / On n’a pas oublié que dans Invasion Los Angeles, les aliens républicains asservissaient le monde en diffusant des messages subliminaux à travers le signal cathodique. Autant dire que Carpenter n’a que peu d’estime pour la télévision de masse. Pourtant, c’est elle qui l’a sorti de sa retraite ces huit dernières années, grâce aux deux saisons de l’inégale série Masters of horror. Dans la première salve d’épisodes, celui de Carpenter s’appelle Cigarette Burns, mais c’est sous un autre titre qu’on le connaît en France, La Fin absolue du monde. En fait, ce titre est celui d’un film mystérieux que tout le monde recherche, à commencer par un projectionniste cinéphile en conflit avec son futur beau-père, propriétaire du cinéma dans lequel il travaille. Carpenter recherche aussi ces images perdues : un film si atroce que sa violence déborde l’écran, du moins selon la légende qui s’est formée autour de lui après sa présentation lors d’un festival. Film sombre, inquiétant, métaphysique, Cigarette burns donnait enfin de bonnes nouvelles du maître. En revanche, son épisode de la saison 2, Pro-life, était moins réussi. Mais beaucoup plus gonflé, par contre ! Si l’ensemble paraissait bâclé, affaibli par des effets spéciaux hideux, Carpenter remettait un pied dans l’arène politique, en chargeant violemment le lobby anti-avortement. À travers un dispositif de huis clos familier au cinéaste (proche de celui d’Assaut et de Prince des Ténèbres), il brouille à nouveau les frontières entre le bien et le mal, l’humanité et la monstruosité. Si ces deux expériences télévisuelles rassurent sur la verve et la vivacité du cinéaste après une si longue période d’inactivité, elles montrent aussi par l’absurde à quel point ses films sont faits pour s’épanouir sur un écran large. Rabotée de son cinémascope fétiche, la mise en scène de Carpenter semble avoir les ailes coupées (comme l’ange de Cigarette burns), enfermée dans une boîte lumineuse trop étroite pour ses ambitions.
CC