Montrer ce qu'il se fait aujourd'hui en France au niveau chorégraphique : tel est le pari du concours [re]connaissance, qui en est à sa quatrième édition. Ce week-end, sur deux soirs, le public pourra ainsi découvrir douze compagnies différentes et, cerise sur le gâteau, voter pour celle qu'il préfère. C'est beau la démocratie ! Aurélien Martinez
La danse, c'est sympa, mais c'est quand même compliqué. Compliqué pour les compagnies, car la plupart ne tournent pas beaucoup ; voire pas du tout. Et du coup, par ricochet, compliqué pour le public, qui n'arrive pas toujours à trouver des spectacles aux esthétiques variées – sauf si, bien sûr, on habite dans une grande ville. En 2009, nous avions donc vu d'un bon œil le projet impulsé par le Pacifique de Grenoble et la Maison de la danse de Lyon. Ensemble, les deux structures avaient créé le concours [re]connaissance. Le principe ? Sur deux soirs, douze compagnies présentaient un extrait d'une pièce récente (ou la pièce en entier si elle n'excédait pas 25 minutes), et un jury de professionnels décernait deux prix à leurs favorites. Quant aux spectateurs, ils avaient leur mot à dire avec le prix du public. Une fois les choix dévoilés, le processus s'enclenchait pour les trois lauréates, avec une tournée assurée dans la plupart des lieux partenaires (quatorze à l'époque) : une belle exposition. La première édition s'était tenue à l'Hexagone de Meylan, devant une salle comble, attentive et très hétérogène, et c'était une réussite – malgré un palmarès discutable de la part des professionnels, mais c'est le jeu (paradoxalement, le public avait été beaucoup plus audacieux).
« Être vu »
Après une deuxième édition à Décines en 2010, et une troisième à Annemasse en 2011, le concours est de retour dans l'agglo, cette fois-ci à la Rampe d'Échirolles. Avec toujours le même principe : deux soirs pour découvrir douze compagnies proposées par les différents partenaires (aujourd'hui au nombre de vingt). Des compagnies qui ne sont pas forcément reconnues, même si elles peuvent être en activité depuis déjà longtemps. C'est le cas de la compagnie grenobloise Épiderme de Nicolas Hubert, en résidence à la Rampe depuis deux ans. Pour [re]connaissance, le chorégraphe présentera (re)flux (photo), sa dernière pièce créée le mois dernier à la Ponatière. « Avec cette participation, j'attends surtout de la visibilité par rapport aux professionnels. Parce que l'on est à un stade où l'on commence à avoir les moyens de travailler, et un soutien pérenne des collectivités ou de partenaires comme la Rampe et le Pacifique. Mais quand on montre nos créations, on ne voit pas assez de professionnels. » Comme ce fut le cas sur Work in regress (?), son avant-dernière proposition inventive et solidement ficelée que l'on avait ardemment défendue dans nos colonnes, mais qui n'aura été jouée qu'une seule fois après son dévoilement à la Rampe : ce n'est pas beaucoup ! « Quand on raconte ça aux gens, souvent, ils tombent de leur chaise ! Donc, pour [re]connaissance, plus qu'un prix ou je ne sais quoi, on cherche avant tout à être vus par des pros. » Et par le public aussi.
« On continue »
Au départ, le concours ne devait durer que quatre ans, pour ne pas sombrer dans la redite, et ne pas racler les fonds de tiroirs niveau participants – car il faut tout de même avoir un certain niveau pour postuler à [re]connaissance. Sauf que les organisateurs sont comme les politiques, ils ont du mal à dire stop, trouvant toujours un moyen de revenir sur leur parole. « On s'aperçoit que ça marche, que les pros sont toujours au rendez-vous, et que l'on a énormément de demandes de compagnies. [re]connaissance semble remplir son rôle de visibilité, donc on continue ! » explique Christiane Blaise, la directrice artistique du Pacifique. Pour les prochaines éditions, le concours restera le même, « mais deux choses vont changer. On va essayer de faire rentrer un ou deux partenaires européens proches – par exemple de Belgique, d'Italie, ou du Luxembourg... Et il y aura des modifications dans la tournée : les lieux ne seront plus obligés de prendre la plateforme avec les trois compagnies gagnantes, mais pourront choisir une compagnie parmi les trois avec, du coup, une pièce entière. » L'avenir de [re]connaissance semble donc s'écrire en lettre capitales et scintillantes, ce qui est une excellente nouvelle.
[re]connaissance, vendredi 23 et samedi 24 novembre, à la Rampe (Échirolles).
Infos pratiques ici.