Etat des lieux

Panorama / La diversité des salles de concert de l'agglo grenobloise, si elle ne manque pas de se poser en reflet du foisonnement artistique local, ne peut pallier aux besoins criants en la matière. Tour d'horizon des forces en présence et d'un deus ex machina pour l'instant virtuel. François Cau

Juin 2003. Le microcosme des musiques actuelles grenobloises se prend un gros coup derrière la nuque avec la fermeture de l'Entre-Pot. Les libations de son ultime soirée digérées pendant l'été, le manque se fait sentir dès la rentrée. La nécessité d'une salle intermédiaire, d'une jauge de 1000 places maximum, ne se fait plus seulement sentir mais commence à puer à plein nez. Mantra revenant sans fin sur le tapis de la politique culturelle de la ville depuis la montée en puissance (et surtout en nombre) des formations musicales de Grenoble et des environs, en plein boom dès les années 90, cette salle devient peu à peu une arlésienne malgré elle, après avoir été un argument électoral des municipales de 2001. Passées les élections, deux propositions municipales se font progressivement jour. D'un côté, est suggéré le rattachement au nouveau projet d'équipement culturel enclenché par la ville de Fontaine, une convention de fonctionnement entre cette ville et Grenoble étant à l'ordre du jour. De l'autre, la réhabilitation du site Bouchayer-Viallet ; depuis 1993, des squatteurs sont dans les lieux, et les ont réaménagé en espaces culturels alternatifs, fédéré depuis 2000 sous l'association Mandrak. Las, les procédures d'expulsion répétées, les obstacles juridiques permanents et finalement les interdictions de concerts de "musiques amplifiées" auront raison du squat, entré dans le panthéon des initiatives locales gâchées. La salle de 1000 places, elle, demeure en stand-by. Contre-propositionsLa municipalité se focalise sur le pôle Régie2C, partagé entre la prog' irréprochable du Ciel et la diversité proposée par la Chaufferie. Dixit Jérôme Safar, «Quand je suis arrivé en 2001, ce manque était déjà criant, on a pensé qu'il allait être pallié par les initiatives organisées dans l'agglomération, on a préféré attendre de voir ce qu'il se passait avant d'engager quoi que ce soit. On paie aujourd'hui le fait qu'au moment où la Chaufferie s'est ouverte, on aurait dû lancer le projet de salle de diffusion». Des alternatives à ce marasme apparaissent effectivement contre vents et marées. Les cafés-concerts se multiplient et tentent de survivre comme ils le peuvent dans une nuit grenobloise englobée par le “quiet sound”. Le 16 janvier 2004, toutes les têtes se tournent vers St-Martin-d'Hères où s'ouvre l'Art-Scène, avec sa salle de 180 places, son espace bar, son resto et sa baignoire dans les loges. Passée l'euphorie des premiers mois, la programmation s'est joliment stabilisée, offre ses rendez-vous réguliers pour s'affirmer comme un beau compromis excentré. À la rentrée dernière, on pariait (à juste titre) sur deux outsiders dans cette nouvelle donne. La salle EVE, en dépit des contraintes imposées par l'architecture du lieu, s'est flanquée d'une programmation proprement monstrueuse, attirant un public venu voir des artistes peu (voire jamais) passés chez nous. L'autre gagnant de la saison, c'est l'Auditorium de la Maison de la Musique de Meylan, qui s'est décidé à mouiller le maillot en ouvrant ses portes à une programmation gorgée d'artistes incontournables. Le succès incontestable de l'opération annonce non seulement sa reconduction plus que probable l'an prochain, mais aussi la réalité d'un public grenoblois entièrement disposé à se déplacer en nombre pour peu qu'on lui propose. On attend l'ouverture imminente d'un nouvel Auditorium à Crolles, qui accueillirait en son sein une école, mais aussi des spectacles de théâtre, danse... et des musiques actuelles.La suite au prochain épisodeCette offre supplémentaire n'efface pas le besoin concret, à présent désespéré aux yeux de ses défenseurs, de cette foutue salle de 1000 places. À l'initiative d'un récent Comité de Soutien pour la Création d'une scène des Musiques Actuelles (voir ci-dessous), la première pierre symbolique de la salle fut posée derrière la mairie, parc Paul Mistral, le 28 février, en présence approbative de Jérôme Safar. Lequel s'apprête à proposer aux élus, dès la fin du mois, le lancement d'un comité de pilotage, conduit par lui-même et Geneviève Fioraso, adjointe au développement économique et élue "chef de file" du dossier Bouchayer-Viallet. À leurs côtés, des membres du Comité de Soutien mais aussi Michel Orier ou Jacques Panisset. «On rendra la liste publique vers le 20 avril, on est en train de la finaliser en ce moment. (...) Dès le début de notre mandat, on savait qu'on avait des possibilités sur le site Bouchayer-Viallet, dans la petite halle. Mais il faut être très clair, ce n'est pas un combat gagné politiquement, d'abord parce que tous les élus de tous les groupes ne sont pas convaincus de ce manque-là, donc il y aura un travail de pédagogie à faire. Je pense qu'il faudra surtout qu'on procède tranquillement par discussion, par confrontations aussi, peut-être, faire prendre conscience à tous les élus qu'aujourd'hui si on est à Grenoble, il y a vraiment une difficulté, en termes de musiques actuelles, pour assister au spectacle auquel on veut assister». Pendant le temps de latence (la mairie évoque au conditionnel violemment souligné un début des opérations vers fin 2006 début 2007), Jérôme Safar évoque la possibilité de relancer une ébauche de convention avec la future salle de Fontaine en attendant la fin des travaux, mais les prévisions d'ouverture sont là aussi incertaines (voir ci-dessus). Reste enfin la question problématique de la gestion de cette (toujours hypothétique) salle. L'adjoint à la culture, au fait des rumeurs persistantes quant à la mise en œuvre d’une Régie3C, souhaite «mettre à plat toutes les possibilités, élaborer une réflexion qui n'excluerait pas les acteurs culturels dès le départ», pour aboutir à une vision partagée par le plus grand nombre. Laurent Ageron, rappelant les positions précaires de certaines associations musicales suite à la suppression des emplois-jeunes (Rocktambule, mais surtout Dynamusic), espère que les sommes engagées dans ce projet permettraient de rallier ces postes sur la sellette. Le feuilleton de la salle des 1000, en tout cas, n'a pas dit son dernier mot.

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