La valse des pantins

Petrouchka / Devant l’entrée d’un cinéma, la foule commence à se rassembler. Curé, flics, badauds, tous se pressent devant l’entrée, entament quelques pas de deux, se réjouissent visiblement à l’idée d’aller assister à la projection du soir. Le décor est grand, vif, coloré, les costumes radieux et clinquants. Benjamin Millepied installe avec un art savant de la bonhomie une ambiance de nostalgie fiévreuse, sans tomber dans l’hommage compassé pour autant. Les danseurs nous entraînent dans leur jubilation jusqu’au changement de décor, la séance commence et le meilleur reste à venir grâce à l’habile parti pris du chorégraphe : transposer le fameux ménage à trois de marionnettes imaginé par Stravinski du champ de foire à une salle de cinéma.
Une fois tous les interprètes assis, un rideau s’ouvre sur la savoureuse figuration d’un film en noir et blanc, relatant l’esquisse de la joute entre Petrouchka et le Maure pour le cœur de la Ballerine. Petrouchka finit par sortir de l’écran, bientôt imité par ses deux camarades, pour prolonger l’action dans le cinéma (puis dans la salle pendant un changement de plateau).
Dès lors, la pièce prend un rythme quasi frénétique, enchaîne les clins d’œil malicieux aux figures imposées du cinéma muet comique, les inévitables Chaplin et Keaton en tête. L’émotion reprendra ses droits (car après tout, on est dans un récit à la finalité dramatique) dans un beau duo entre Petrouchka et la Ballerine, venant rappeler à juste titre qu’un traitement humoristique n’est jamais aussi efficace que quand il est pris au sérieux.
C’est là tout le propos de ce Petrouchka à la légèreté maîtrisée, scénographié en collaboration avec l’illustrateur de livres pour enfants Paul Cox : donner une vision récréative de l’œuvre, titiller l’imaginaire de façon ludique et avec une redoutable efficacité. Alors certes, à côté de la radicalité d’Andonis Foniadakis, cette pièce de Benjamin Millepied peut ne ressembler qu’à un “simple“ divertissement. Mais si tous les divertissements avaient cette exigence, le monde serait sans doute meilleur. FC

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