Toto qui vécut deux fois

De Danièle Cipri et Franco Maresco (1998, Italie, 1h35) avec Salvatore Gattuso, Marcello Miranda…

Blasphématoire, Toto qui vécut deux fois ? C’est en tout cas ce que la censure italienne a décrété en 1998, quand ce premier film de deux cinéastes venus de la télévision a cherché à sortir en salles. Du coup, interdiction totale, puis interdiction aux moins de 18 ans et finalement blocus des Catholiques à l’entrée des cinémas. Or, comme souvent, la religion se couvre de ridicule en se trompant d’ennemis. S’il y a bien dans le film un messie nommé Toto qui accomplit des miracles dans une Sicile qu’on croirait sortie d’une toile de Jérôme Bosch, s’il est entouré par des obsédés sexuels se frottant le bas-ventre la bave aux lèvres et des prostitués barbus, si on voit même des pénis en érection à l’écran, le film est cependant l’inverse d’une attaque contre l’Église. Et les spectateurs à l’esprit ouvert trouveront tout cela très (trop ?) moral. Le modèle évident de Cipri et Maresco est L’Évangile selon Saint-Mathieu, autre film italien qui offrait une relecture très libre du Nouveau Testament. De Pasolini, ils reprennent le noir et blanc, le choix d’un traitement réaliste des «miracles» et même la fameuse Passion de Bach. Composé de trois histoires qui se croisent épisodiquement (avec un twist final étonnant), Toto qui vécut deux fois s’inscrit dans un monde décadent, où la misère sociale a accouché d’un désastre humain, les êtres étant rendus à leurs instincts primaires (bouffer, baiser, déféquer), incapables de saisir la main qui leur offre le salut. Des mafieux passent au milieu de tout cela, et on comprend que derrière leur élégance pincée se cache une des causes de cette régression infernale. Les tableaux horriblement beaux inventés par les cinéastes témoignent de cette fin de partie grotesque et tragique. Dissipant toute ambiguïté, les deux cinéastes ne tirent aucun plaisir à ce carnaval hideux, se pinçant le nez devant la gangrène désespérée qui ronge le Sud de l’Italie. Ainsi soit-il… CCProjections mardi 17 (18h30) et mercredi 18 novembre (16h), au Club, dans le cadre des Rencontres du Cinéma Italien

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